« Il est temps de reconnaître la médiation sociale comme un métier à part entière. » C'est par ce message que plusieurs centaines d'acteurs sociaux et d'élus locaux nous ont alertés sur la nécessité de reconnaître institutionnellement la médiation sociale.
Quelque 14 % des Français, soit près de 7 millions de citoyens, sont en situation d'isolement ; 9 millions de personnes vivent sous le seuil de pauvreté et on constate chez deux personnes sur trois au moins une source de vulnérabilité en matière de santé, de logement, de travail, de pauvreté ou d'accès aux droits. La tâche est donc énorme.
Les pratiques de médiation sociale sont riches et nombreuses. Dans les années 1980, les femmes relais utilisaient leurs expériences personnelles pour accompagner leurs voisines dans l'accomplissement de leurs démarches auprès des services sociaux, de la préfecture ou de la protection maternelle et infantile (PMI). Les emplois jeunes, dans les années 1990, ont permis de rétablir le lien social et de réguler les conflits dans certains quartiers.
La médiation sociale est définie par l'association France Médiation, qui s'appuie sur la charte de référence en la matière, comme « un processus de création et de réparation du lien social mais aussi de règlement des conflits de la vie quotidienne, dans lequel un tiers impartial et indépendant tente, à travers l'organisation d'échanges entre les personnes ou les institutions, de les aider à améliorer une relation ou de régler un conflit qui les oppose ».
La médiation vise à remettre de l'humain dans nos territoires et à retisser du lien social. Ce n'est pas un détail : les tracasseries administratives, les conflits entre voisins ou avec les bailleurs, les démarches en ligne, les erreurs de saisie, le bruit de voisinage ou les difficultés de prise en charge médicale sont un ensemble d'affections qui finissent par atteindre de manière conséquente les conditions de vie voire la santé mentale de nombre de nos concitoyens.
La médiation est aussi une manière de lutter contre l'isolement. Les médiateurs sociaux méritent à ce titre une reconnaissance institutionnelle et un véritable statut qui n'existent pas aujourd'hui ; c'est la raison d'être de cette proposition de loi. La médiation, c'est cette huile dans les rouages, cette capacité à agir avec les protagonistes et non à leur place. Elle ne s'intègre pas dans un régime d'avertissement, de sanction ou de culpabilisation : elle est constitutive d'une autre approche, respectueuse et fondée sur la proximité. Mais être médiateur ou médiatrice sociale, ce n'est pas simple : cela demande des compétences multiples qui vont de la gestion de conflits à la capacité à naviguer entre les différents acteurs, en passant par la connaissance de l'informatique et des démarches administratives.
Il faut donc leur garantir les moyens et le soutien politique dont ils ont besoin. Si cette proposition de loi est un premier pas, le chemin de la reconnaissance institutionnelle et politique menant à la légitimation totale des médiateurs sociaux est encore long. Les moyens ne sont pas encore à la hauteur de l'ambition affichée. Surtout, la médiation sociale ne pourra pas être un remède miracle aux difficultés sociales, aux tensions urbaines ou aux problèmes d'accès aux droits. Elle ne peut se substituer à la justice – notamment pour les femmes battues