C'est également une source de difficulté pour nous. Certaines des enquêtes que nous avons à conduire concernent des faits anciens, voire très anciens. Les personnes visées s'inscrivaient dans un contexte qui pouvait conduire à la commission de violences psychologiques, voire physiques – je ne parle pas, évidemment, de violences sexuelles. Elles sont mises en cause des années plus tard, et l'on demande alors à l'administration et aux fédérations de prendre des mesures qui soient à la hauteur de la gravité des faits.
Dans ces cas, nous sommes confrontés à des difficultés de deux ordres. D'une part, l'administration doit évaluer le risque que présente aujourd'hui la personne vis-à-vis du public susceptible de lui être confié. Nous ne sommes pas des juges et nous n'avons pas à rechercher une sanction : il nous appartient de protéger le public. Or il s'agit d'affaires très graves, dans lesquelles les personnes mises en cause sont parfois toujours aux responsabilités, mais au sujet desquelles nous n'avons pas d'éléments précis, récents, qui laisseraient à penser que ce risque existe toujours. C'est absolument inaudible pour les victimes, puisque cela revient, dans une certaine mesure, à nier leur souffrance.
D'autre part, comment peut-on resituer la personne mise en cause dans un contexte où, manifestement, tout le monde savait et personne n'a rien fait ? Finalement, cela donne le sentiment que certains seront les boucs émissaires du système, même s'ils y ont bien sûr contribué. J'ajoute immédiatement que le système ne justifiera jamais certaines pratiques et que ce que je dis n'est pas de nature à remettre en cause les responsabilités individuelles. Cela étant, c'est une question très complexe pour les personnes qui, au sein de nos services, ont à conduire les enquêtes.