Intervention de Delphine Lingemann

Réunion du mercredi 17 janvier 2024 à 9h00
Commission des affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDelphine Lingemann, rapporteure :

La convention visée par le projet de loi a été signée le 15 juin 2022 à Chisinau. Elle tend à combler le vide juridique – unique en Europe, à l'exception du Danemark et de la Suède – caractérisant les relations fiscales entre la France et la Moldavie. Depuis la dénonciation par la Moldavie, en 1998, de la convention fiscale conclue entre la France et l'Union des Républiques socialistes soviétiques (URSS), les acteurs du commerce entre les deux pays et les contribuables intéressés sont exposés à un risque de double imposition. D'après les négociateurs de la convention, que j'ai auditionnés, les discussions ayant présidé à sa rédaction ont été menées dans un esprit constructif et efficace.

La convention comprend un titre, un préambule, trente articles et une annexe. Ses dispositions sont très largement conformes au modèle de convention fiscale de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). La répartition des droits à imposer est également conforme à notre pratique conventionnelle.

L'article 21 règle les modalités de la double imposition : 65 Français sont inscrits sur les listes consulaires en Moldavie et environ 90 000 Moldaves résident en France.

Classiquement, la France prévoit l'octroi d'un crédit d'impôt imputable sur l'impôt français égal soit à l'impôt étranger plafonné à l'impôt français, soit à l'impôt français. Cette méthode, retenue depuis 1990, permet d'éviter les cas de double exonération tout en appliquant les dispositions anti-abus du droit interne. La Moldavie, quant à elle, élimine la double imposition en retenant la méthode du crédit d'impôt égal à l'impôt français dès lors que la convention prévoit que le revenu peut être taxé en France. Ce crédit impôt est imputable sur l'impôt moldave correspondant et plafonné à sa hauteur. S'agissant des revenus pour lesquels la convention prévoit une taxation exclusive en France, en l'absence de stipulations spécifiques, la Moldavie peut accorder une exemption totale d'impôt.

Cette convention fiscale moderne intègre de façon opportune les derniers standards de l'OCDE en matière de coopération fiscale et de garantie des droits des contribuables. Elle offre d'indéniables avancées en matière de simplification et de sécurité juridique, pour les particuliers et pour les entreprises. Elle doit avant tout permettre de renforcer les investissements français en Moldavie. La France est le quatrième investisseur étranger du pays. Son stock d'investissement s'élève à 124 millions d'euros et augmente constamment. Le montant des exportations françaises en Moldavie a augmenté de plus de 50 % au premier semestre 2022 par rapport à celui de l'année précédente.

Par ailleurs, plusieurs projets d'envergure sont engagés en matière d'infrastructures destinées au désenclavement ferroviaire et routier du pays, et aussi pour renforcer la sécurité énergétique de la Moldavie, qui malheureusement dépend encore beaucoup de la Russie. Les entreprises françaises sont engagées dans ce pays, notamment pour y développer des projets dans le domaine des énergies renouvelables (EnR). Au printemps 2024, une délégation du Mouvement des entreprises de France International (Medef International) formée de nombreux représentants d'entreprises se rendra en Moldavie pour y conclure des contrats.

Sur le plan politique, je rappelle, en tant que présidente du groupe d'amitié France-Moldavie, que notre vote ce matin s'inscrit dans la poursuite du rapprochement de ce pays avec les États membres de l'Union européenne (UE). Située aux limites des sphères d'influence de l'Europe et de la Russie, la Moldavie s'est nettement rapprochée de l'UE dans les années récentes, et plus encore depuis l'arrivée au pouvoir de la présidente Maïa Sandu et l'invasion de l'Ukraine.

La Moldavie est signataire d'un accord d'association avec l'UE, entré en vigueur le 1er septembre 2014. Elle a obtenu le statut officiel de candidat à l'adhésion le 23 juin 2022. Les efforts de la Moldavie pour moderniser ses standards de gouvernance sont, de l'avis de tous les observateurs, à saluer. En outre, un lien particulier nous unit à ce pays majoritairement de langue latine. Près de 40 % des écoliers du secondaire y apprennent le français. L'Alliance française de Moldavie, où je me suis rendue, compte 3 500 élèves, ce qui en fait l'une des plus importantes d'Europe.

Si la convention fiscale du 15 juin 2022 doit renforcer les investissements croisés entre nos deux pays, elle participe aussi d'un dessein plus large visant à arrimer la République de Moldavie à la famille démocratique européenne, et singulièrement à renforcer ses liens économiques et culturels avec la France.

Aussi, chers collègues, je vous invite à approuver ce projet de loi.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion