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Intervention de Naïma Moutchou

Séance en hémicycle du jeudi 18 janvier 2024 à 15h00
Assurer une justice patrimoniale au sein de la famille — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaNaïma Moutchou :

Tout a été dit, et très bien dit ; pour paraphraser les propos du président Bourlanges ce matin, il ne me reste qu'à dire le reste.

Je veux tout d'abord adresser mes remerciements au groupe Démocrate pour l'inscription de ce texte à l'ordre du jour et remercier son auteur, notre collègue Hubert Ott, ainsi que notre brillante rapporteure. Le sujet de la lutte contre les violences conjugales n'est malheureusement pas épuisé. Tout ce qui apporte, avec efficacité et réalisme, davantage de justice et d'équité est bienvenu. Cette proposition de loi est donc bienvenue.

Il est particulièrement choquant que le droit actuel ne permette pas de révoquer l'avantage matrimonial qui aurait été consenti à l'un des époux quand celui-ci a été condamné pour le meurtre de son conjoint. L'avantage matrimonial, ce n'est pas rien : il permet l'attribution au conjoint survivant, au moyen d'une clause intégrée au contrat de mariage, d'une part non négligeable du patrimoine. Si la loi permet la révocation d'une donation ou d'une succession lorsque le bénéficiaire a commis une infraction à l'encontre du donateur ou du testateur, en application des principes d'indignité successorale ou d'ingratitude s'agissant des donations, ces mécanismes ne s'appliquent pas aux avantages matrimoniaux. Il n'y a rien sur le sujet dans le code civil, ni dans la jurisprudence – c'est normal : elle ne fait qu'appliquer la loi. La jurisprudence a même rappelé la persistance de cette anomalie par un arrêt de la Cour de cassation du 7 avril 1998 : les héritiers d'une femme assassinée par son époux s'étaient pourvus en cassation pour demander que le meurtrier condamné soit privé de l'avantage matrimonial, mais le pourvoi a été rejeté en raison du silence de la loi sur ce point.

Par l'article 1er , nous étendons le mécanisme de déchéance de l'avantage matrimonial en cas de meurtre dont s'est rendu coupable le conjoint. En commission des lois, nous avons adopté un amendement de réécriture qui substitue au mécanisme de l'ingratitude celui de l'indignité successorale, plus adapté au cas de l'avantage matrimonial mais dont l'objectif est le même : protéger le patrimoine du défunt, la victime. Nous avons également soustrait les clauses d'exclusion des biens professionnels du périmètre de l'avantage matrimonial afin de mieux protéger les biens professionnels en cas de séparation.

L'article 2, tel qu'il a été récrit en commission, facilite le recours contre l'administration en cas de refus de décharge de solidarité fiscale, c'est-à-dire de refus de mettre fin au sacro-saint principe de solidarité des dettes fiscales qui existe entre époux et ex-époux en cas d'imposition commune. Ces demandes de décharge émanent dans la plupart des cas des femmes : ce sont elles qui se trouvent en général en situation de précarité économique au sein du foyer. Cette situation avait d'ailleurs inspiré l'amendement que mon collègue Philippe Gosselin et moi avions déposé, puis travaillé en liaison avec M. le ministre, en vue de permettre aux victimes de violences conjugales – souvent des femmes, donc – de bénéficier de l'aide juridictionnelle dès le dépôt de la plainte. C'était un autre moyen d'éviter l'écueil des ressources financières.

Nous soutiendrons l'article 2, puisque la solidarité fiscale n'a plus de sens dès lors que la situation patrimoniale de l'ancien conjoint est disproportionnée par rapport à une dette fiscale contractée lors de l'union et que la personne concernée n'a pas d'autre solution que la décharge.

Le groupe Horizons et apparentés votera pour cette proposition de loi, car elle permet de franchir une marche supplémentaire dans l'amélioration de la protection des victimes. Il faudra en monter d'autres, vu l'urgence de la question. Nous examinerons d'ailleurs la semaine prochaine la proposition de loi de notre collègue Chandler visant à allonger la durée de l'ordonnance de protection et à créer l'ordonnance provisoire de protection immédiate. Nous serons également à ce rendez-vous.

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