Vous êtes chargée d'un super portefeuille regroupant travail, santé et solidarité. Il ne faudrait pas toutefois que cela s'apparente à un sous-ministère de la santé, ce qui nous fait craindre le pire, en particulier pour la psychiatrie, secteur dans lequel les futurs internes ne veulent plus aller et où les psychiatres et les paramédicaux épuisés désertent l'hôpital public. Je dis craindre le pire mais, pour de trop nombreux patients et leurs proches ainsi que pour certains professionnels, on pourrait difficilement faire pire.
Il n'y a rien de pire, en effet, pour le personnel médical que de savoir qu'il se situe à la limite de l'éthique. Pourtant, les professionnels sentent qu'ils et elles peuvent être responsables de maltraitance à l'encontre de leurs patients, tant ils manquent de lits, de temps et de moyens. C'est d'une violence inouïe pour eux et leurs patients.
Imaginez-vous devoir faire le tri entre des personnes qui ont besoin d'aide. La réalité de la psychiatrie est souvent devenue celle du tri quotidien. Voilà ce que j'ai entendu dans un hôpital psychiatrique, la semaine dernière : « On trie la souffrance, la douleur ; il faut que les ministres sachent ». Alors, si vous ne le savez pas encore, sachez-le, madame la ministre. Dans l'hôpital que je viens d'évoquer, il faudrait vingt psychiatres, alors qu'ils ne sont plus que dix. La semaine dernière, cet établissement a reçu huit demandes d'admission pour une seule place disponible. Où vont les sept autres ? En outre, lorsqu'un patient est admis, son temps d'hospitalisation est raccourci et, à sa sortie, il n'y a plus forcément d'aval ni de réponse médico-sociale ; il n'y a pas d'ailleurs. Je le répète : laisser dépérir la psychiatrie, c'est accroître la violence dans notre société.
Entendez-vous vous battre, madame la ministre, pour que la psychiatrie devienne une véritable grande cause nationale et pour nous faire sortir de cette situation catastrophique, intenable et délirante ? J'avais invité l'ex-ministre Aurélien Rousseau à nous rendre visite afin de constater que je ne noircis pas le tableau ; je vous propose donc de venir en Loire-Atlantique, afin de voir et d'entendre la réalité vécue par les équipes.