Si je peux me permettre, nous vivons un moment plutôt paradoxal : hier, dans son intervention, le Président de la République a balayé de nombreux sujets, mais celui que nous évoquons aujourd'hui, à l'initiative du Parlement, demeure sous les radars de toutes les prises de position, y compris au sein de votre ministère depuis des années – sauf, comme l'a rappelé Aurélien Pradié, pour se lamenter sur le caractère sinistré de la politique de psychiatrie publique en France.
Il y a vingt-cinq ans, j'étais président de l'hôpital psychiatrique Barthélemy Durand, dans l'Essonne, établissement dans lequel est née la psychiatrie de secteur en France. Depuis, nous constatons la fragilisation constante du secteur de la psychiatrie, des centres médico-psychologiques, des centres d'accueil thérapeutique à temps partiel (CATTP), des hôpitaux de jour et de toutes les structures de psychiatrie de secteur qui lui sont adossées, notamment dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville. À cet égard, j'aimerais que vous nous répondiez sur un paradoxe absolu : lors de la réunion du comité interministériel des villes (CIV) présidé par Élisabeth Borne peu avant les fêtes de Noël, pas une mesure n'a été envisagée pour favoriser l'accès aux soins en santé mentale et à la psychiatrie de secteur dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville.
Nous sommes tous convaincus, dans cet hémicycle, qu'il convient de changer de braquet sur ce sujet. Étant d'un naturel optimiste, je vois un avantage à ce que vous soyez, madame la ministre, à la tête d'un mastodonte social transversal : dans les trois secteurs dont vous avez la charge, à savoir la santé, le travail et la solidarité – je pense à l'aide sociale à l'enfance, à la gérontopsychiatrie pour les personnes âgées ou au problème de santé publique que constitue le suicide des personnes âgées –, bref, dans tous les couloirs de votre département ministériel gigantesque, il y a des enjeux de santé mentale – nous pourrions également évoquer le burn-out en milieu professionnel.
Au moment où votre feuille de route est encore en construction – nous comprenons bien que vous prenez le relais de dispositions que vous n'avez pas décidées –, pouvez-vous nous indiquer si le Premier ministre annoncera, dans son discours de politique générale non soumis à un vote de confiance, qu'il donnera la priorité aux politiques publiques de santé mentale et aux enjeux que nous venons de mentionner ?