Entre mai 2023 et janvier 2024, l'agence NewsGuard notait une augmentation de 1 200 % des sites internet générés par l'intelligence artificielle et relayant des informations erronées ou volontairement fausses. En novembre 2023, la représentation permanente de la France à l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) dénonçait l'ingérence numérique russe, l'accusant d'exploiter les crises internationales pour semer la confusion et créer des tensions dans le débat public et les États démocratiques.
Cette ingérence numérique est d'autant plus efficace et significative dans les pays dits en développement, dans lesquels l'instabilité est, par définition, plus grande et où la désinformation s'oppose frontalement aux efforts de coopération et de partenariat, de la France notamment.
De 2018 à 2023, le comité interministériel de la coopération internationale et du développement avait défini une liste de dix-huit pays prioritaires de l'aide française au développement. Parmi ceux-ci, cinq se sont abstenus ou ont voté contre les résolutions du retrait des troupes russes en Ukraine à l'ONU en 2022 et en 2023 ; d'autres, comme le Niger, ont entériné cet été un refus en bloc des échanges bilatéraux avec la France, souvent au profit de relations accrues avec des régimes autoritaires.
Comment expliquer que, depuis des années, la France n'ait pas redoublé d'efforts budgétaires pour soutenir ses pays partenaires, alors que la désinformation contribuait directement à l'érosion de l'influence française ? Quelle sera désormais notre stratégie d'influence et de choix dans l'aide au développement ? Nous savons que les populations en ont besoin pour répondre à des enjeux tels que le climat ou l'éducation, des jeunes filles en particulier, face à des systèmes qui participent à la désinformation. L'aide au développement est aussi victime de la guerre numérique menée grâce à l'intelligence artificielle contre les États.