En ce moment même, affluent dans la petite station de Davos les jets privés de centaines de PDG soucieux de se ménager un siège auprès des chefs d'État et de gouvernement. Pendant ce temps, Oxfam nous alerte : alors que la fortune des milliardaires a augmenté de 3 300 milliards de dollars depuis 2020, près de 60 % de la planète s'est appauvrie ; au rythme actuel, il faudrait plus de deux siècles pour mettre fin à la pauvreté. Cette situation n'est même plus injuste, elle est indécente. Elle appelle un engagement renouvelé en faveur de la solidarité internationale, une action concrète pour réduire les inégalités, lutter contre la pauvreté et garantir l'accès pour toutes et tous aux droits fondamentaux.
Avec le Sommet pour un nouveau pacte financier mondial, la France semblait afficher cet engagement, en défendant le souhait ambitieux de réformer l'architecture et le fonctionnement des grands fonds d'aides au développement internationaux. Pourtant, les dernières décisions prises au niveau national contredisent les belles déclarations faites sur la scène internationale. Cet été, lors d'un Cicid organisé en catimini et sans en informer le Parlement, le Gouvernement a remis en cause la trajectoire de l'APD, inscrite dans la loi de 2021, repoussant de cinq ans l'objectif d'allouer 0,7 % du RNB à l'APD et retirant ainsi 11 milliards d'euros à la solidarité internationale.
À l'automne, lors de l'examen du budget, ce fut pire. Pour la première fois depuis des années, le Gouvernement a présenté des crédits en stagnation. En tant que rapporteure pour avis de la commission des affaires étrangères, j'ai alerté sur ce recul pour la solidarité internationale, qui s'apparente plus à une réduction des crédits compte tenu de l'inflation. La suite, vous la connaissez : malgré les nombreuses alertes des acteurs du développement et nos amendements visant à donner à la solidarité internationale les moyens qu'elle mérite, c'est un budget rabougri qui a été adopté par un énième 49.3.
Alors que nous devons renforcer les systèmes de santé mondiaux et nous préparer aux prochaines pandémies, les derniers documents budgétaires prévoient de réduire les engagements en matière de santé mondiale : un signal d'autant plus alarmant que nous ne consacrons que 8 % de notre APD à la santé quand 4,5 milliards de personnes ne peuvent toujours pas accéder aux services de soins essentiels. Madame la ministre déléguée, alors que les actions du Gouvernement ont jusqu'ici contredit ses déclarations, quelles seront ses ambitions pour prendre part à la lutte contre l'extrême pauvreté et les inégalités de santé ?