. Madame la présidente, monsieur le rapporteur, mesdames et messieurs les députés, avant de revenir sur la question des réquisitions lors des interventions, permettez-moi de souligner que je rejoins totalement les propos de M. Voisin.
Pour revenir sur le sujet des agréments, vous savez que les associations agréées de sécurité civile sont, pourrait-on dire, plus que des associations. Nos missions sont importantes en ce que nous venons en aide aux gens, nous leur portons secours, nous pouvons être amenés à réaliser des massages cardiaques ou des gestes invasifs qui présentent un risque, et qui nécessitent en cela des agréments. Malheureusement, aujourd'hui, ces agréments, au sens de la protection civile, ne sont pas assez restrictifs. Pour mémoire, deux types d'agréments existent : les nationaux et les départementaux. Ces derniers sont directement remis par les préfectures à des associations locales. Les agréments nationaux, eux, sont remis à des fédérations ou des associations nationales dès l'instant où elles peuvent justifier d'une certaine étendue géographique ou d'un nombre de structures minimum. Or, les agréments nationaux sont, selon nous, trop simples à obtenir, et ne font pas suffisamment l'objet de contrôles. La loi Matras évoquée précédemment, et qui permet le contrôle des associations locales, va dans le bon sens, c'était d'ailleurs une demande de la protection civile. Nous ne souhaitons pas que survienne un jour un accident causé par un défibrillateur mal entretenu, qui nuirait à l'image de toutes et tous.
Les agréments départementaux présentent encore davantage de risques, puisqu'ils sont remis par les préfectures à des structures de toute petite taille, qui ne sont rattachées à aucune association nationale pouvant les contrôler. Nous évoquerons ultérieurement le modèle économique des associations, qui est fragile, mais avant même de devoir aborder la question du recours aux deniers publics, une piste qui pourrait être explorée est celle de la réduction du nombre d'associations à travers la suppression des agréments départementaux. Le montant à répartir reste constant à l'échelle d'un département. Comme vous le savez, nos associations se financent par les postes de secours et les formations. Aujourd'hui, on retrouve dans certains départements comme celui du Bas-Rhin un total de 17 associations agréées de sécurité civile. Or, il est impossible pour 17 associations d'avoir suffisamment de fonds à se partager pour vivre et se développer. Cela présente également, pour les services préfectoraux, des difficultés en matière de gestion en cas de survenue d'une crise importante, puisqu'ils auront alors à faire face à 17 interlocuteurs différents représentant de toutes petites associations. On le comprend bien, la gestion de crise n'est pas opérationnelle.
Une autre problématique se situe dans le modèle économique de ces agréments : l'État a confié aux associations, à travers la délivrance des agréments, la responsabilité de venir en aide et au secours du public dès l'instant où survient une crise, mais sans s'investir financièrement. En contrepartie, les associations ont bénéficié de marchés réservés à travers les postes de secours et les formations. Cela a conduit à des abus, et certaines associations ne sont aujourd'hui rien d'autre que des sociétés déguisées qui se positionnent uniquement sur les postes de secours ou les formations, voire les deux, mais qui n'effectuent aucune des missions coûteuses comme le soutien aux populations sinistrées. Cela cause, pour nous, un effet de dumping et de concurrence déloyale qui est délétère. La protection civile investit par exemple actuellement dans des véhicules de soutien aux populations, qui coûtent 250 000 ou 300 000 euros pièce. Ce sont des investissements qui sont effectués sur plusieurs années. Si, en face, on trouve des associations qui, elles, ne font que des postes de secours ou de la formation pour rémunérer deux ou trois dirigeants, l'effet est forcément néfaste.
J'en reviens maintenant aux propos de M. Voisin sur les problèmes de réquisition. On sait que des associations interviennent aujourd'hui de façon importante pour porter secours aux populations sinistrées, en Bretagne ou comme actuellement dans les départements du Pas-de-Calais et du Nord. La problématique ne réside pas dans le fait de trouver des missions, puisqu'elles nous sont confiées par les mairies ou les préfectures, mais dans le fait de légitimer nos interventions. Pour illustrer mes propos, je prendrais l'exemple de notre intervention actuelle dans le département du Pas-de-Calais : depuis environ trois semaines, ce sont jusqu'à 150 bénévoles qui sont mobilisés sur place, sans que nous n'ayons à ce stade reçu la réquisition. Nous savons qu'elle va arriver, mais pour l'obtenir, nous avons dû contourner les blocages locaux en faisant appel aux services du ministère de l'intérieur.
Je pense que chacune des associations autour de cette table pourra citer un exemple de difficulté d'obtention de réquisition, ce qui est dommageable pour l'intervention et finalement pour les citoyens. Nous sommes donc aujourd'hui face à deux options : intervenir sans attendre la réquisition, afin d'aider les populations, tout en prenant un risque financier et en faisant courir un risque à nos bénévoles, ou attendre. Mais si nous avions dû attendre, nous ne serions toujours pas dans le Pas-de-Calais aujourd'hui.