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Intervention de Naïma Moutchou

Réunion du mercredi 10 janvier 2024 à 9h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaNaïma Moutchou :

Je salue cette proposition très intéressante de notre collègue Hubert Ott. Elle apporte une réponse bienvenue à une situation d'injustice et d'inégalité.

C'est surprenant mais notre droit permet au partenaire ou époux condamné pour le meurtre de son conjoint de bénéficier des avantages matrimoniaux. C'est particulièrement choquant. Rien n'est prévu pour l'empêcher, même par la jurisprudence. Le mécanisme de l'indignité successorale existe bien, mais le code civil empêche de l'appliquer dans ce cas. Bien entendu, les dispositions de ce code qui empêchent de révoquer les avantages matrimoniaux ont une explication et il ne s'agit pas de remettre en question leur principe. Ils ont été pensés en effet pour protéger le conjoint survivant. Mais ils n'ont plus de sens lorsque c'est le conjoint lui-même qui est à l'origine du décès de son compagnon ou de sa compagne.

C'est la raison pour laquelle je suis d'accord avec l'objectif de l'article 1er, qui vise à supprimer le bénéfice des avantages matrimoniaux en cas de décès lié à des violences conjugales. Cela va permettre d'étendre aux avantages matrimoniaux les cas d'ingratitude applicables en matière de donations. Le groupe Horizons et apparentés soutient pleinement la réécriture de l'article proposée par la rapporteure.

Néanmoins, dans un souci de clarté juridique, ne serait-il pas préférable de se référer aux cas d'indignité successorale plutôt qu'à ceux d'ingratitude ? Les premiers supposent une condamnation pénale, sachant que l'objectif reste le même : protéger le patrimoine de celui qui a été victime de son conjoint.

Le deuxième article, qui prévoit de faciliter la décharge de solidarité fiscale, concerne une question un peu technique mais très importante. Le droit actuel permet déjà de mettre fin à l'imposition commune entre époux et ex-époux. On sait que les demandes de décharge émanent le plus fréquemment des femmes, qui sont souvent dépendantes économiquement de leur conjoint au sein du foyer. Avec mon collègue Philippe Gosselin, j'avais déposé en 2020 un amendement adopté à l'unanimité qui, dans les cas de violences conjugales, prévoyait la possibilité d'obtenir une aide juridictionnelle dès le dépôt d'une plainte. Nous souhaitions précisément lutter contre la situation économique défavorable subie par les femmes et cet article est animé par le même esprit. C'est important car, comme le note très bien le rapport, les demandes de décharge aboutissent rarement.

Pour pallier ces difficultés, vous proposez de restreindre l'appréciation de la situation patrimoniale en excluant un certain nombre de biens. On peut comprendre cette mesure, mais il faut veiller à encadrer l'application de cette nouvelle exception afin que le principe de solidarité fiscale ne finisse pas par disparaître. C'est un point sur lequel nous pouvons réfléchir d'ici à l'examen en séance.

Comme on le voit, il reste encore beaucoup à faire en matière de justice patrimoniale et de lutte contre les violences conjugales et intrafamiliales. Je sais que ce sujet vous tient à cœur, madame la rapporteure. Vous avez fait des propositions de manière récurrente en la matière, et il est utile de parler aussi des enfants victimes.

Notre groupe votera pour ce texte.

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