Pour m'être intéressé à ces sujets tout au long de ma carrière, je serais tenté de partager votre constat.
Le modèle de la TNT payante est en attrition : il n'existe plus qu'à travers Canal+, et Paris Première d'une certaine façon. Toutes les autres expériences ont pris fin. Quand nous avons renouvelé l'autorisation de Canal+ en 2020, aucun autre candidat n'a proposé un modèle de TNT payante. Nous verrons ce qu'il en sera avec l'appel à venir. Le développement des plateformes de streaming et des services de médias audiovisuels à la demande explique cette disparition.
Par ailleurs, la TNT offrait d'un côté des chaînes généralistes et de l'autre des chaînes thématiques ; on observe en effet chez les secondes cette tendance à l'homogénéisation des programmes. Beaucoup sont liées à des chaînes premium, notamment celles qui sont rattachées à TF1 et M6 ; elles servent souvent à faire circuler les œuvres : ce que l'on a vu chez l'une se retrouve chez l'autre. Il existe encore des dominantes : ainsi, W9 conserve, conformément à sa convention, une dominante musicale.
Ce constat s'explique à mon sens par l'évolution du modèle économique des chaînes, qui, pour les chaînes privées, repose sur la publicité. La presse écrite a connu une forte baisse du marché publicitaire, et une tendance similaire s'amorce pour la radio ; il y a une concurrence des plateformes de streaming, notamment pour les radios musicales. Pour la télévision, les ressources publicitaires sont étales – quelque 3 milliards par an – mais les acteurs sont contraints d'investir, à la fois dans la technologie – en s'engageant dans le streaming pour aller chercher les publics là où ils sont, notamment les jeunes – et dans les contenus – pour rivaliser avec la compétition. Les plateformes de streaming fonctionnent toutes selon un principe d'exclusivité : elles « signent » les artistes, comme on dit. L'inflation du coût des programmes est incontestable. Tout cela coûte très cher.
Toutes les chaînes sont donc engagées dans un double mouvement d'investissement et de rationalisation de leurs coûts : le groupe TF1 vient ainsi d'annoncer un plan d'économies substantiel, mais aussi des investissements sur la diffusion à la demande ou streaming.