Merci de votre invitation, c'est toujours un honneur d'être reçu à l'Assemblée nationale.
Le service que je dirige est l'un de ceux qui ne sont pas un SDIS : il s'agit du service d'incendie et de secours (SIS) du Bas-Rhin, qui est présidé, comme le SIS du Haut-Rhin, par le président de la collectivité européenne d'Alsace. C'est un service relativement classique, composé de 4 500 sapeurs-pompiers volontaires et d'un peu moins de 900 personnels administratifs, techniques et sapeurs-pompiers professionnels. Le maillage territorial est très dense en Alsace, mais il existe une différence entre les deux départements : dans le Haut-Rhin, les corps communaux sont prééminents, alors que dans le Bas-Rhin, la totalité ont été intégrés au corps départemental. Je le précise, car ce point pourra être intégré à notre réflexion. Notre budget tourne autour de 100 millions d'euros en fonctionnement et 30 millions en investissement.
J'identifie à l'heure actuelle trois difficultés : la première, partagée par mes collègues, est relative au financement du service ; la deuxième est liée à la disponibilité de nos sapeurs-pompiers volontaires ; la troisième découle d'une perte de sens. La semaine dernière, l'un de nos véhicules de secours et d'assistance aux victimes a dû attendre six heures et demie sur le parking de l'un des centres hospitaliers de Strasbourg avant de pouvoir lui confier la personne qu'il avait prise en charge. Cette situation, qui n'a rien d'exceptionnel, pose la question du sens de notre mission : parfois, notre mission de secours d'urgence aux personnes (Suap) n'a rien d'urgent, ne relève pas du secours et consiste surtout en de l'assistanat – d'où des sapeurs-pompiers, professionnels ou volontaires, qui nous disent qu'ils ne sont pas devenus sapeurs-pompiers pour faire le taxi. En outre, les temps d'intervention deviennent inacceptables, alors que la disponibilité de nos volontaires la journée en semaine est déjà fortement contrainte.
Il s'agit selon moi d'un abus de service public. Lorsque l'on demande à nos sapeurs-pompiers de quitter leur domicile ou leur employeur pour une intervention présentée comme urgente, on leur fait d'abord prendre des risques sur la route. Ensuite, arrivés sur les lieux de l'intervention, ils doivent parfois attendre quarante minutes avant d'obtenir une réponse du centre de réception et de régulation des appels du 15. Enfin, il arrive que la clinique privée vers laquelle ils ont été orientés refuse d'accueillir la personne prise en charge et les renvoie vers l'hôpital public – où ils attendent finalement six heures et demie ! Je caricature à peine. Cela soulève de vraies difficultés : alors que nous nous battons pour que les employeurs libèrent leur personnel, ils sont de moins en moins enclins à le faire, car lorsqu'un sapeur-pompier part en intervention, ils ne le voient plus de la journée, ce qui est tout de même regrettable pour les interventions qui ne relèvent pas de notre mission.