Intervention de Davy Rimane

Séance en hémicycle du jeudi 21 décembre 2023 à 15h30
Motion de censure — Discussion et vote

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDavy Rimane :

Ce sont les faits, monsieur le ministre délégué.

Dans ces conditions, comment ce budget peut-il répondre aux urgences sociales auxquelles nous sommes confrontés, à commencer par la première d'entre elles, la baisse du pouvoir d'achat ? Nous n'avons toujours pas de réponse. L'inflation cumulée a atteint en deux ans près de 20 % dans l'Hexagone et la situation est pire encore dans les territoires ultramarins. Je rappelle, monsieur le ministre délégué, que la délégation aux outre-mer de l'Assemblée vous a invité à venir échanger sur le sujet : elle n'a obtenu comme réponse de vos collaborateurs qu'un « bon courage »…

Face à l'inflation galopante, les salaires n'ont pas suivi, si bien qu'un grand nombre de nos concitoyens sont désormais rémunérés au niveau du Smic. Or on ne peut pas vivre avec un Smic, a fortiori lorsqu'on occupe un emploi à temps partiel. De manière générale, de nombreux Français ne peuvent plus vivre de leur travail, comme le montrent les 2 millions de travailleurs pauvres. Le projet de loi de finances et plus généralement les textes budgétaires de cette année constituent une occasion manquée d'agir de manière contraignante sur les salaires ; nous le regrettons.

Cette situation conduit à accentuer encore davantage les inégalités économiques : les 500 plus grosses fortunes cumulent 1 000 milliards d'euros de patrimoine – un record ! – tandis que plus de 10 millions de personnes vivent sous le seuil de pauvreté – encore un record ! J'ajoute que c'est le cas de 77 % de la population à Mayotte et de 53 % des habitants de la Guyane. Comme l'ont démontré nos collègues Jean-Paul Mattei et Nicolas Sansu dans leur rapport d'information relatif à la fiscalité du patrimoine, ces inégalités gangrènent la société, qui redevient progressivement une société de rentiers et d'héritiers, une société figée dans laquelle il n'y a plus de mobilité sociale.

À l'heure où une juste répartition de l'impôt est de plus en plus nécessaire, vous vous obstinez à refuser toute mesure en ce sens, à commencer par une contribution exceptionnelle des très hauts patrimoines pour financer la transition écologique, une mesure qui semble pourtant consensuelle. Une juste répartition de l'impôt est seule à même de garantir la souscription de tous au contrat social et son corollaire indispensable, le consentement à l'impôt.

Quant au financement de la transition écologique, la rénovation de l'habitat, le renouvellement des infrastructures de transport, le développement des mobilités douces, la transition agricole ou encore le développement des services publics de proximité nécessitent des apports financiers aux antipodes de la course aux économies à laquelle vous vous adonnez. Ces besoins sont renforcés dans les territoires d'outre-mer, dont je suis issu, dans lesquels la fracture avec le territoire hexagonal est grandissante.

Les crédits supplémentaires que vous accordez aux territoires ultramarins sont loin d'être suffisants pour pallier les retards de développement qu'ils subissent depuis trop longtemps. La précarité du logement, l'ampleur de l'habitat indigne, les bidonvilles qui enflent à vue d'œil, l'état pitoyable des infrastructures, notamment routières – lorsqu'elles existent –, l'accès à l'eau potable, complètement entravé, voire inexistant : loin de constituer de simples statistiques, ces carences profondes affectent le quotidien de centaines de milliers de vos concitoyens ultramarins. Car oui, ils sont Français, comme vous, n'en déplaise à ceux qui voient en l'homme noir un étranger éternel qu'il conviendrait d'embarquer dans un charter.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion