Il est bon de rappeler que notre agriculture est l'une des meilleures au monde.
Je ne connais pas d'agriculteur qui utilise des produits phyto par plaisir. Reconception du modèle, soit, mais le défi d'entraînement ne marche pas à tous les coups : dans l'organisation de producteurs dont je fais partie, trois sur douze se sont convertis au bio il y a quelques années, mais, faute d'acheteurs et de consommateurs, certains retournent au conventionnel. Produire bio n'est pas produire sans traitement, et cela implique plus de travail manuel, des impasses techniques, des pertes, des déclassements. Personnellement, j'ai arraché la moitié de mon verger et la quasi-totalité de mes cerisiers en quelques années : face aux impasses, il faut changer les variétés, ce qui n'est pas si facile. Les producteurs produisent ce qui se vend ; or la majorité des consommateurs va vers les promotions. Ne faut-il pas commencer par éduquer les acheteurs et les consommateurs à accepter les fruits et légumes « moches » ? Est-il raisonnable d'imposer aux agriculteurs le cahier des charges des grands magasins, d'exiger d'eux des fruits d'apparence impeccable sans pesticides ? En clair, les Français sont-ils prêts, eux, à reconcevoir le modèle économique et à payer le prix juste pour une nourriture d'aspect différent ?