Chaque catastrophe pose des difficultés différentes. Par exemple, le nombre élevé de victimes peut nécessiter des adaptations de grande ampleur du système de santé. C'est la situation que nous avons vécue pendant la crise sanitaire. Le Haut-Rhin était au cœur de cette crise, et il a fallu mobiliser des moyens de transfert considérables pour répartir cette demande. L'afflux de victimes est donc le premier défi des catastrophes naturelles ou technologiques, d'autant plus que notre système de santé est fragilisé. Nous avons moins de moyens aujourd'hui pour réagir à de tels événements. Heureusement, nous pouvons compter sur le sursaut républicain pour parvenir à trouver des ressources humaines et matérielles en cas de crise majeure.
Par ailleurs, chaque type de risque s'accompagne de problématiques spécifiques, qu'elles soient chimiques, bactériologiques, radiologiques ou technologiques. Une expertise particulière est nécessaire pour traiter ces dommages. Nous nous appuyons souvent sur l'expertise des sapeurs-pompiers en matière de risques technologiques.
Même si chaque département recense les risques rencontrés sur son territoire et mène un travail à ce sujet, il reste une marge de progrès importante pour savoir s'adapter à ces situations. J'en veux pour preuve les derniers attentats que nous avons connus, et en particulier celui du Bataclan : nous n'étions pas préparés à une agression collective de cette nature, commise avec des armes de guerre. Suite à ces événements, nous avons engagé un travail avec différents corps et experts médicaux pour en tirer une doctrine. Celle-ci a été déployée à l'échelle nationale, et s'est traduite par la formation massive de médecins et chirurgiens au contrôle des dommages (damage control).
Je constate que cinq ans après les attentats, ce savoir n'est plus maintenu au quotidien. De nombreux chirurgiens ne pratiquent plus cette compétence, qui n'est pas nécessaire dans leur quotidien. Cela constitue une différence majeure entre le milieu hospitalier et les acteurs de la sécurité civile. Ces derniers ont pour mission de se préparer à ce type d'interventions et de maintenir l'expertise propre aux différents risques, tandis que le rôle des praticiens hospitaliers consiste à soigner au quotidien leurs patients. La difficulté consiste donc à préserver un haut niveau de compétences parmi les personnels médicaux et les soignants. Un urgentiste doit détenir des connaissances pointues sur les risques radiologiques, biologiques ou chimiques, mais aussi être capable d'intervenir pour des accidents de train ou de bateau.
Le Samu dispose aussi d'équipes engagées dans des milieux spécifiques comme la mer ou la montagne. Il est plus facile de maintenir ces compétences grâce à des exercices réguliers en milieu naturel.