Notre population est en effet jeune, avec une moyenne d'âge globale de 30,5 ans. Parmi les militaires du rang, qui représentent 75 % de notre effectif, la moyenne d'âge est de 27 ans.
Le recrutement et la fidélisation constituent en effet deux préoccupations majeures pour la BSPP. Notre ambition est de recruter chaque année près de 1 200 jeunes, en raison du renouvellement élevé. Bon nombre des jeunes qui rejoignent la BSPP n'y restent pas. Ils intègrent ensuite les corps de sapeurs-pompiers départementaux.
Depuis deux ans, nous faisons face à un réel problème de recrutement. En 2022, nous n'avons recruté que 930 jeunes, au lieu des 1 000 attendus. Cette année, nous n'effectuerons que 1 050 recrutements, pour un objectif de 1 200.
Ces difficultés s'expliquent par plusieurs facteurs. Dans son enquête Les Français, l'effort et la fatigue, Jérôme Fourquet a demandé à un panel de 1 000 personnes d'indiquer les raisons pour lesquelles elles n'accepteraient pas un travail. Parmi la tranche des 18 à 25 ans, les principaux motifs évoqués étaient les suivants : trop d'efforts physiques, trop de stress, pas de télétravail. Il va de soi que le métier de sapeur-pompier ne répond pas à ces exigences. La génération Z pratique une certaine forme de chantage au télétravail auprès des recruteurs. À titre personnel, cette réalité me désespère quelque peu en ce qui concerne la générosité de notre jeunesse.
Un autre problème réside dans la perte d'attractivité de la région parisienne : où sont passés les Rastignac du XXIe siècle ? Les jeunes n'ont-ils plus envie de partir à la conquête de Paris ?
De plus, les jeunes ont tendance à vivre en couple bien plus tôt qu'il y a trente ans, et sont donc peu enclins à quitter leur commune ou leur département.
Se pose aussi la question de la fidélisation, à travers le renouvellement du premier contrat et les renouvellements ultérieurs. Après le renouvellement du premier contrat, le jeune est fidélisé et reste souvent cinq ans à la brigade. En revanche, il est difficile de garder les recrues après ce premier renouvellement. À ce propos, je tiens à appeler votre attention sur le concours de sapeur-pompier professionnel. En 2022, 800 jeunes ont passé ce concours, ce qui représente 10 % de l'effectif des sapeurs-pompiers de Paris. Sur les 500 lauréats, 350 ont déjà quitté la Brigade. Les 150 lauréats restants attendent de trouver une place dans leur département d'origine.
Le prochain concours aura lieu fin 2023. Près de 500 candidats y sont inscrits, et la plupart des lauréats voudront également quitter Paris pour rejoindre leur département. J'ai donc écrit à tous les patrons des services départementaux d'incendie et de secours (SDIS) pour leur demander de ne pas recruter de jeunes avant les Jeux olympiques. Le fait est que la BSPP a impérativement besoin de tout son personnel pour cet enjeu national.
Nous avons d'ailleurs souhaité instaurer une disposition empêchant les personnels recrutés, pendant les cinq années du premier contrat, de passer ce concours de la fonction publique. Malheureusement, il n'a pas été possible d'entériner cette règle.
Il est à noter que 30 % des sapeurs-pompiers de la BSPP sont des volontaires. Chaque année, entre 200 et 300 d'entre eux se reconvertissent en tant que professionnels. L'efficacité de la sécurité civile dépend du fonctionnement de la brigade. Or le recrutement et la fidélisation des jeunes constituent pour nous une problématique essentielle. L'ancienneté en service est de six ans, alors qu'elle devrait être de huit ans. Il est donc indispensable de parvenir à fidéliser les jeunes à l'institution à laquelle ils sont liés durant les cinq ans de leur premier contrat.
J'en viens à votre question sur les secours et soins d'urgence aux personnes (Ssuap). À ma connaissance, le taux de sollicitation de Ssuap à la BSPP est équivalent à celui constaté chez les sapeurs-pompiers territoriaux. Il se situe entre 80 et 84 %. Toutefois, il faut savoir que, parmi les 400 000 départs enregistrés chaque année, entre 60 000 et 100 000 ne sont pas des urgences. De fait, ces interventions ne nécessitaient pas l'envoi d'un véhicule franchissant les feux rouges, emportant trois professionnels très qualifiés et du matériel très coûteux et transportant les victimes aux urgences. C'est un sujet de fond.
En 2019, mes prédécesseurs ont passé un contrat de service avec le préfet de police, l'ARS et les Samu. Je constate que de réels progrès ont été accomplis. Les Samu ont plus de moyens. Lors du congrès de la Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France (FNSPF), le ministre de la santé a indiqué qu'il avait augmenté les moyens des ARS pour leur permettre de déployer des ambulances supplémentaires en faisant appel aux associations de transports sanitaires d'urgence (Atsu). Ce service est moins coûteux, parce que les véhicules n'embarquent que deux personnes, mais il est soumis à un engagement moral d'intervention dans un délai de 20 à 30 minutes.
Il serait aussi souhaitable que les personnes prises en charge ne soient pas systématiquement emmenées aux urgences. Le passage d'un médecin de garde ou d'un infirmier permettrait de réorienter certains patients et de limiter le temps d'attente aux urgences. À Paris, nous avons la chance d'avoir de nombreux services d'accueil d'urgence. Les délais de prise en charge aux urgences y sont donc plus courts que dans d'autres secteurs. Nous disposons encore d'un solide maillage d'hôpitaux et de services d'accueil d'urgence qui sont ouverts en permanence.
Il existe en effet une interopérabilité entre la BSPP et le Samu. Lorsqu'une personne compose le 15, le Samu s'efforce d'apporter la réponse la mieux adaptée à la situation et d'orienter au mieux l'intéressé. Cependant, le Samu demande chaque jour l'intervention de 350 véhicules de service et d'assistance aux victimes (VSAV). Lorsqu'une personne compose le 18, ce sont nos opérateurs qui qualifient l'intervention et envoient si besoin un VSAV. Ils peuvent aussi diriger l'appel vers un opérateur du 15 tout en restant en ligne, sous forme de conférence à trois. Les deux dispositifs sont donc pleinement interopérables.
Enfin, pour ce qui est du budget de la BSPP sur les dix dernières années, je précise que le budget de 2013 s'élevait à 391 millions d'euros. Par comparaison, le budget alloué pour l'année 2023 représentait 505 millions d'euros, soit une hausse de 29 %. Cette progression, essentiellement liée à l'augmentation salutaire de 2023 (+ 9 %), résulte notamment de l'inflation et de l'accroissement des coûts de l'énergie. En 2022, nos dépenses d'électricité se montaient à 7,7 millions d'euros. En 2023, elles devraient atteindre 10,3 millions d'euros. Pour l'année 2024, nos coûts d'électricité sont estimés entre 11,5 et 12 millions d'euros. Cette évolution est d'autant plus frappante que, dans le même temps, notre consommation a diminué. En effet, j'ai lancé auprès de tous mes capitaines et colonels le défi de la compagnie la plus économe en énergie (eau, chauffage, gaz et électricité). Grâce à cette opération, nous sommes parvenus à réduire de 6 à 7 % notre consommation d'électricité dès 2023.
À cette hausse des prix de l'énergie s'ajoutent les coûts liés à la transition énergétique. Il faut savoir qu'un VSAV électrique coûte 170 000 euros, alors qu'un VSAV thermique est vendu à 100 000 euros.
Les pièces détachées subissent, elles aussi, une inflation importante (+16 %).
Enfin, il faut également tenir compte de l'augmentation de la masse salariale. Comme je vous l'ai expliqué, les militaires du rang représentent 75 % de notre effectif. Ils perçoivent de faibles salaires au regard de leur volume de travail. Ils travaillent en effet 3 040 heures par an, soit près du double des 35 heures par semaine, pour une rémunération mensuelle de 2 100 euros. En 2020, ils ne percevaient que 1 800 euros par mois. Cette revalorisation contribue à fidéliser ces personnels et les aide à supporter les coûts de l'inflation, autant de mesures qui renchérissent les coûts pour l'État et les contributeurs locaux.
En tout état de cause, le budget 2023 répondait précisément aux attentes de la brigade. De ce fait, nous n'avons pas eu besoin de mobiliser un complément de budget – y compris pour financer la revalorisation du point d'indice et la prime exceptionnelle versée dès septembre. Celle-ci a été attribuée à tous les personnels touchant un salaire de moins de 2 300 euros brut, soit 80 % des effectifs de la brigade.