Intervention de Marc Fesneau

Réunion du mercredi 6 décembre 2023 à 15h00
Commission des affaires économiques

Marc Fesneau, ministre :

M. Dive veut faire la révolution et vous voulez vous inspirer des États-Unis ! J'y perds mon latin et mon grec ! Heureusement, M. de Courson tient fièrement sa ligne.

Monsieur Vigier, vous avez raison, à force d'accumulation, nous avons créé des systèmes complexes. Et souvent, quand on a voulu simplifier, le résultat était encore plus compliqué. Il faut s'interroger sur ce que nous pouvons simplifier. La PAC est complexe, parce qu'elle a dû répondre à des cas très divers. Mais il existe des marges. Prenons l'exemple des haies : les règlements se chevauchent jusqu'à se contredire. Il faut sans doute moins de réglementation et davantage de cohérence.

Madame Le Peih, nous sommes favorables à tout ce qui encouragera le collectif.

Monsieur Girardin, il faut absolument éviter de produire une réglementation distincte de celle de l'Union européenne. On se bat au niveau européen pour arriver à ce que vous souhaitez. Mais, alors que la loi Agec n'est déjà pas allée sans difficultés, n'allons pas tout bousculer au niveau européen, sans quoi on va perdre tout le monde et ce seront nos filières qui en subiront les conséquences. La question de l'emballage est en effet d'une vraie complexité pour la filière bio.

Monsieur de Courson, les investissements dans les GFAI pourront bien bénéficier d'une défiscalisation. Attention toutefois au statut du fermage, qui est un élément de stabilité et de compétitivité qui protège le producteur. Autant il serait utile de le renforcer, autant le remettre en cause serait une erreur.

Monsieur Dubois, il est en effet indispensable de planifier la gestion de l'eau et de trouver cet équilibre délicat entre la nécessité de produire et celle de préserver la ressource. Reconnaissez que nous sommes le premier Gouvernement à poser la question !

Monsieur Marchive, le décret précisant les conditions de l'agrivoltaïsme est en cours de finalisation et sera soumis à concertation dans les prochains jours. Le ministère de l'agriculture estime qu'il ne faut pas se priver de cette occasion. La question du taux d'emprise sera aussi à étudier. Enfin, les commissions départementales de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers (CDPENAF) permettront d'écarter les projets alibis de ceux qui se prétendraient éleveurs après avoir mis trois moutons sur 30 hectares. Des dispositifs de sanction permettront de requalifier de tels projets. Pour éviter tout risque d'exclusion, les CDPENAF auront un rôle essentiel. L'agrivoltaïsme vient utilement rappeler que l'agriculture produit de l'énergie : les méthaniseurs, le photovoltaïque ou la biomasse sous d'autres formes, qui peuvent apporter un complément de revenus. Il faudra néanmoins travailler sur la question de la répartition de la valeur : à qui ira l'argent ? Au propriétaire, à la collectivité, à l'exploitant ? Faudrait-il envisager des mutualisations pour éviter les dérives ?

Monsieur Brun, nous formulerons des préconisations sur la viande de synthèse. Mon sentiment à son égard est plus que mitigé. C'est curieux comme certains, qui passent leur temps à taper sur l'élevage, défendent dans le même temps la viande de synthèse tout en nous disant qu'il faut maintenir les prairies. Ce sont d'ailleurs les mêmes qui refusent l'hybridation ou les manipulations génétiques mais qui laisseraient aux laboratoires le soin de faire une viande dont on ne sait pas très bien comment elle sera produite et qui pose une vraie question environnementale, celle de son bilan carbone notamment. Enfin, alors qu'il y a des centaines de milliers d'éleveurs en Europe, ce modèle est aux mains de seulement cinq multinationales – la viande de synthèse, on ne la fera pas dans nos cuisines –, alors qu'on promeut le principe de gagner en souveraineté et de ne pas être dépendants des grands groupes. Certains objectent qu'il ne faut pas passer à côté d'opportunités économiques mais cela pose également des questions éthiques d'importance. Les courants à l'œuvre sont parfois anti-élevage. Si la viande de synthèse est le cheval de Troie des anti-élevage pour les faire disparaître, c'est d'autant plus grave ! Il faut estimer précisément les conséquences, notamment environnementales, et voir quel cadre envisager, sachant qu'on ne peut pas en exiger un pour l'agriculture sans rien imposer à ces sociétés.

Monsieur Dive, le travail sur les retraites relève désormais du niveau réglementaire. Plusieurs scénarios sont à l'étude : soit on applique les nouvelles dispositions aux seuls entrants, soit on fait une double liquidation. Il faut regarder les perdants. La loi ne règle pas le problème, d'autant que la reconstitution des carrières est compliquée. Si le texte fait qu'il y a plus de perdants que de gagnants, ce n'est pas une avancée.

Madame Petel, il n'y a pas de monopole de ces sociétés, le contrôle est encadré par la réglementation et a été renforcé en 2018.

Monsieur Bony et tous ceux qui m'ont interrogé sur le loup, il me reste sans doute un fond d'idéalisme, mais j'aimerais que, concernant les chiffres, on cesse de jouer à la police contre les organisateurs. La première des choses, c'est de se mettre d'accord sur un mode de comptage non seulement national mais européen. C'est d'ailleurs l'une des propositions du plan loup 2024-2029 : c'est une question de crédibilité et de confiance avec les agriculteurs. Depuis que le loup a été réintroduit en France en 1992, il ne s'est quasiment rien passé, alors que quelques Gouvernements se sont succédé. On est passé de zéro à plus de mille loups. C'est pourquoi nous avons décidé, pour la première fois, de réinterroger le statut de l'espèce. On ne peut pas laisser les arbres monter jusqu'au ciel. Ce n'est plus la démographie du loup qui est menacée, c'est le pastoralisme.

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