Un grand nombre de ces restes humains n'ont pas leur place dans les collections de nos musées. Bien souvent, ils ont été acquis dans des conditions qui entrent en contradiction avec les valeurs démocratiques. Pensons aux trophées de guerre ou à certains commerces barbares, comme celui des têtes maories, au centre d'une affaire il y a une quinzaine d'années au muséum de Rouen.
La proposition de loi permettra de faciliter la restitution de ces restes humains à des États étrangers. D'initiative sénatoriale, elle introduit une dérogation générale au principe d'inaliénabilité, rendant possible, sous certaines conditions, la sortie de restes humains du domaine public sans que soit délivrée, au cas par cas, une autorisation de l'Assemblée nationale et du Sénat.
En créant un comité scientifique composé de représentants des deux États concernés et des institutions détenant les restes humains, ce texte permet d'adopter une approche collaborative, pluridisciplinaire et impartiale. Les membres du comité évalueront ensemble de manière précise les demandes de déclassement et de restitution, en tenant compte des aspects humains, éthiques et scientifiques, dans le respect des individus dont les restes sont en jeu. Ce dispositif cadre offre une solution globale et transparente pour la restitution des restes humains, dans le respect de la dignité de la personne, des cultures, de la mémoire et des principes de justice.
Toutefois, alors que les travaux de l'Assemblée nationale avaient permis d'intégrer l'aspect mémoriel, pour inclure les restitutions visant à l'accomplissement de rites ancestraux ou de cérémonies n'ayant pas nécessairement, ou uniquement, une nature funéraire, nous regrettons que la CMP n'ait pas retenu cet ajout précieux.
L'identité, l'origine et la trajectoire de la plupart des restes humains conservés dans les collections demeurant inconnus, leur identification représentera un travail supplémentaire et minutieux pour les équipes des musées. Les établissements les plus modestes doutent de disposer des moyens suffisants. Aussi, madame la ministre, des moyens financiers et matériels seront certainement nécessaires.
Enfin, j'aurai un mot pour nos concitoyens ultramarins : ce texte ne constitue qu'une première étape. En effet, il ne règle pas la question de la restitution de restes humains d'origine française. Nous prenons acte, madame la ministre, de votre annonce de la création d'une mission parlementaire à ce sujet au printemps. Mes chers collègues, par ce texte, il s'agit de réparer des situations injustes. Réparer, c'est aussi le rôle du législateur. Nous voterons donc en faveur de la proposition de loi, et nous suivrons de près la suite des travaux sur la question.