Intervention de Béatrice Piron

Réunion du mercredi 6 décembre 2023 à 11h00
Commission des affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBéatrice Piron, rapporteure :

Le Danemark, membre de l'Union européenne (UE), est un partenaire commercial important de la France, avec laquelle, en 2022, le montant des échanges bilatéraux s'élevait à 7,4 milliards d'euros. Par ailleurs, 7 200 Français y sont établis ; plus de 400 filiales danoises, employant près de 40 000 personnes, sont présentes sur notre territoire ; la communauté danoise en France compte 3 000 personnes.

Avec la Grèce, la France entretient des relations économiques denses et dynamiques, qui ont augmenté de près de 90 % de 2018 à 2022. La France est le quatrième fournisseur de la Grèce au sein de l'UE. En 2022, la balance commerciale franco-grecque était le sixième excédent commercial de notre pays. La communauté française en Grèce compte 8 000 personnes ; 35 000 citoyens grecs vivent en France.

Ces deux Etats entretiennent avec la France de riches relations. Les deux conventions fiscales dont nous sommes saisis ne résultent pas de la même situation.

La convention signée avec le Danemark le 4 février 2022 vise à remédier à une incongruité. Ce royaume est le seul pays de l'UE qui n'est pas lié à la France par une convention fiscale bilatérale. Celle qui a été conclue en 1957 a été dénoncée unilatéralement par la partie danoise, qui estimait que ses stipulations accordant au seul État de résidence le droit d'imposition des pensions privées n'étaient pas satisfaisantes, ce qui a exposé les contribuables concernés à un risque élevé de double imposition.

La convention signée l'an dernier règle le problème au moyen d'un mécanisme original de crédit d'impôt inversé. Les retraités installés en France percevant des pensions privées de source danoise imposables au Danemark continueront d'acquitter l'impôt sur le revenu à ce titre en France ; ils devront en outre acquitter l'impôt sur le revenu danois minoré du montant acquitté en France. En pratique, le montant perçu par le Trésor danois correspondra à la différence entre l'impôt dû au Danemark et l'impôt acquitté en France. Si l'impôt prévu par le barème fiscal danois est inférieur à celui prévu par le barème français, il ne percevra pas d'impôt. Cette solution préserve les intérêts du Trésor public français.

Par ailleurs, cette convention intègre les derniers standards établis par l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), notamment en matière de clause générale anti-abus, de procédure amiable de règlement des différends et de définition de l'établissement stable. Pour laisser au Danemark le bénéfice de l'exploitation de ses ressources naturelles, ce dernier est constitué à partir de douze mois d'existence.

La convention signée avec la Grèce le 11 mai 2022 met un terme à des difficultés d'application nées de l'évolution des pratiques et des législations depuis la signature, en 1963, du traité précédent, qui n'a fait l'objet d'aucun avenant. Les stipulations de la convention de 2022 clarifient la situation de double imposition des personnes physiques résidant en Grèce et percevant des rémunérations publiques de source française, telles que les personnels du lycée

Elle clarifie notamment la situation des personnes physiques résidentes en Grèce et imposées sur des rémunérations publiques de source française, comme les personnels du lycée franco-hellénique Eugène-Delacroix d'Athènes. Elle affirme le principe d'imposition exclusive dans l'État de source et concerne les 2 000 pensionnés publics résidant en Grèce.

Par ailleurs, elle intègre les dernières avancées en matière de droit fiscal international. Son article 8 précise le cas particulier de la navigation maritime internationale, en imposant ses bénéfices dans l'État d'immatriculation des navires. La Grèce, pays d'armateurs, y est particulièrement attachée.

Les entreprises sont également concernées par ces deux accords, qui sont un facteur de modernisation de la lutte contre l'évitement fiscal et de simplification. Les dividendes sont imposés dans l'État de résidence, sous réserve d'une retenue à la source de 15 %. Les redevances sont imposées dans l'État de résidence sous réserve d'une retenue à la source plafonnée à 5 %.

Le Danemark et la Grèce ont déjà accompli les procédures internes nécessaires à l'entrée en vigueur de ces conventions. Il nous incombe d'y procéder à notre tour, de sorte que ces deux textes puissent entrer en vigueur dès le 1er janvier 2024.

Je souhaite porter à l'attention de la commission l'absence de chiffrage budgétaire de l'étude d'impact du projet de loi, ce qui est d'autant plus surprenant que la direction générale des finances publiques (DGFIP) – qui est la direction « métier » du texte – possède l'intégralité des données fiscales permettant de réaliser de telles simulations et que l'inscription du mécanisme de crédit d'impôt inversé dans une convention fiscale bilatérale est une première. Interrogés sur ce point, les services de l'Etat ont argué de l'absence d'outil permettant d'agréger de façon exhaustive les revenus de chaque contribuable. Il y a là un axe d'amélioration.

Par ailleurs, aucune évaluation ni comparaison des conventions fiscales européennes n'a été réalisée depuis l'entrée en vigueur en 2019 de la convention multilatérale pour la mise en œuvre des mesures relatives aux conventions fiscales pour prévenir l'érosion de la base d'imposition et le transfert de bénéfices (BEPS), conclue dans le cadre de l'OCDE.

Nonobstant ces remarques, je vous invite à adopter le projet de loi.

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