Il s'agit effectivement d'un article important. Nous entendons beaucoup, dans le débat public, qu'il faudrait organiser l'examen des demandes d'asile aux frontières. Je me réjouis que la proposition de loi constitutionnelle des Républicains ne reprenne pas les propos entendus lors de campagnes électorales antérieures, selon lesquels il faudrait les systèmes danois ou britannique. Les uns se rendent au Danemark, les autres en Grande-Bretagne et trouvent formidable l'opt-out qui permet à ces deux pays de recevoir des demandes d'asile sur leurs sols et d'en externaliser l'examen en renvoyant les demandeurs dans un pays tiers – en l'espèce, au Rwanda, en vertu de deux accords bilatéraux, avec la Grande-Bretagne et le Danemark. Vous ne reprenez pas ce dispositif, car vous savez que dans un cas comme dans l'autre, pas un seul demandeur d'asile n'a été renvoyé vers le Rwanda. Je trouve positif que nous progressions, en nous éloignant des solutions « y a qu'à, faut qu'on ».
Vous formulez ici une autre proposition qui circule dans le débat public, à savoir la demande d'asile à la frontière. Je précise que nous le faisons déjà en partie, par des visas pour asile. Dans un pays en guerre, comme l'Afghanistan, il n'est pas envisageable de demander l'asile dans un consulat français – il est fermé dans ce pays. De même, dans des pays qui, sans être en guerre, persécutent une partie de ses ressortissants pour des raisons religieuses, politiques ou d'orientation sexuelle, il n'est pas enviable d'aller dans le consulat de son pays pour demander l'asile. Ce n'est pas ce que vous proposez non plus, puisque vous proposez un examen dans un des consulats ou dans une des ambassades.
Avec le visa pour asile, des agents des ministères de l'intérieur et des affaires étrangères examinent la demande. Si elle est sérieuse, un visa est octroyé pour venir en France et y traiter la demande d'asile. Vous proposez quant à vous de généraliser l'examen des demandes d'asile à l'extérieur de nos frontières.
Je constate que vous avez tiré les conclusions de nos précédents débats. Actant que la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen et les alinéas du préambule de la Constitution de 1946 garantissent le droit de déposer une demande d'asile sur le sol de la République, vous prévoyez, dans votre texte, la possibilité de le faire. Cet article n'est donc pas contraire à ces deux textes.
Des difficultés existent, néanmoins. J'aurais pu, monsieur le rapporteur, accepter votre idée si elle n'était pas une fausse bonne idée et n'aboutissait pas à l'accroissement du nombre de demandes d'asile. Un seul pays au monde, le Brésil, a mis exactement en place ce que vous proposez : il ne le fait plus. Des étrangers pouvaient demander l'asile en dehors de son territoire, depuis ses postes consulaires. Plus de 10 000 Afghans, en deux ans, ont demandé l'asile et sont arrivés au Brésil. Un tiers d'entre eux sont désormais en Guyane, par le jeu de dispositions que nous entendons corriger par le projet de loi inscrit à l'ordre du jour la semaine prochaine, qui permettra de lutter contre cette difficulté migratoire, pour la première fois dans notre République.
Le président Lula a très vite arrêté – je le dis pour les partisans de la France Insoumise. Monsieur le rapporteur, vous avez la même idée que le président brésilien.