Les débats que nous tiendrons nous permettront peut-être de faire évoluer l'article 2 pour parvenir à un consensus nous permettant de redonner à chaque citoyen, comme disait Jaurès, « sa part de souveraineté ».
L'article 3, ensuite, vise à instituer un bien mal nommé bouclier constitutionnel. Ce dispositif prétend écarter le droit international, au mépris du respect de la hiérarchie des normes, lorsque sont en cause des principes inhérents à l'identité constitutionnelle de la France ou à la sauvegarde des intérêts fondamentaux de la nation. Les auteurs du texte entendent ainsi se délier du respect des conventions internationales et des normes européennes qui protègent certains droits en matière d'immigration et d'asile.
Il s'agirait là d'une considérable régression. En effet, l'alinéa 14 du préambule de la Constitution de 1946 dispose que « La République française, fidèle à ses traditions, se conforme aux règles du droit public international ». L'article 55 de la Constitution de 1958 a repris cet héritage, en prévoyant très explicitement la supériorité des traités internationaux sur les lois. La Constitution demeure, en droit interne, la norme suprême. D'ailleurs, le Conseil constitutionnel a déjà eu l'occasion de rappeler, par exemple dans une décision du 27 juillet 2006, que « la transposition d'une directive ne saurait aller à l'encontre d'une règle ou d'un principe inhérent à l'identité constitutionnelle de la France ».
Pour sa part, le droit international est indifférent aux classifications de droit interne : il s'applique toujours avec la même rigueur, quels que soient les obstacles normatifs dans chaque pays. C'est la traduction du principe Pacta sunt servanda, qui signifie que les conventions obligent ceux qui les ont conclues.
Certains accablent souvent les conventions internationales ou l'Union européenne ; vous m'excuserez de faire ce rappel frappé au coin du bon sens, mais personne n'a forcé la France à signer ces traités. Comme l'a rappelé Gérald Darmanin, la France, par la voix de ses dirigeants successifs – y compris de votre famille politique, monsieur le président Ciotti, qui a eu bien raison de le faire à chaque fois qu'elle a été au pouvoir –,…