Je suis heureuse d'examiner avec vous notre proposition de loi visant à remédier aux déséquilibres du marché locatif en zone tendue. Ce sujet est majeur pour nos territoires, nos élus et nos concitoyens, tant est grave ma crise du logement que connaît notre pays. Le poids croissant des plateformes numériques et la multiplication des meublés de tourisme, qui s'est encore intensifiée depuis la crise sanitaire, en sont probablement les symptômes les plus visibles. Cette crise est cependant multifactorielle et nécessitera d'aller au-delà de cette proposition de loi, pour que chacune et chacun puisse, demain, accéder à un logement abordable, partout en France.
En quelques années, près d'un million de meublés de tourisme se sont substitués à des logements classiques destinés à l'habitat permanent. Aucun territoire n'est épargné. De la Bretagne au Pays basque en passant par la Corse, les métropoles, les zones littorales, insulaires, ultramarines et montagneuses, l'ensemble de notre pays est désormais confronté à ce phénomène.
Soyons clairs : l'objectif de cette proposition de loi n'est pas d'interdire l'usage des plateformes ni des meublés de tourisme. Au contraire, nous en avons besoin pour constituer une offre de tourisme adaptée et attractive sur l'ensemble de notre territoire. L'élue bretonne que je suis ne vous dira pas le contraire !
Les locations de courte durée ont certes permis de renforcer une offre touristique parfois insuffisante ou inexistante – et elles continueront de le faire là où nous en avons le plus besoin.
En revanche, le développement de l'immobilier touristique ne doit pas se faire au détriment de la location à l'année et de l'économie productive. Dans certains territoires, la proportion des meublés de tourisme est telle qu'elle transforme en profondeur nos villes et modifie durablement les équilibres économiques et sociaux.
Dans ma circonscription, les entreprises ne parviennent plus à recruter, faute de logements disponibles à l'année. Des villages entiers se vident sous le poids des meublés de tourisme, perdant leur identité et se transformant en villages de vacances. Telle n'est pas ma conception du vivre ensemble, ni de l'économie.
Nous devons garantir à nos territoires des bâtis de qualité, sur le plan environnemental. Or les locations de courte durée ne sont pas soumises au diagnostic de performance énergétique (DPE), contrairement à celles de longue durée : cela explique le développement d'une stratégie d'évitement à l'obligation de rénovation, en basculant vers la location de courte durée. Il convient de corriger ce point avant qu'il ne soit trop tard. C'est l'objet de l'article 1er .
Le texte que nous proposons va dans le sens d'une décentralisation réelle et audacieuse : les élus locaux disposeront d'une véritable boîte à outils, qu'ils pourront utiliser s'ils le souhaitent, pour agir au plus près du terrain. C'est l'objet de l'article 2, qui a été renforcé en commission par de nouveaux dispositifs.
Au-delà des instruments que nous mettons à la disposition des élus, ce texte traite de la fiscalité spécifique des meublés de tourisme, qui est à la fois inéquitable et inefficace puisqu'elle contribue à renforcer la tension locative dans des territoires où le manque de logements pèse déjà fortement sur la croissance. Elle contribue également à augmenter le prix des logements pour les habitants qui rencontraient déjà des difficultés à se loger à l'année.
Enfin, nous vous proposons d'engager un rééquilibrage de la fiscalité locative en faveur de la location de longue durée. Le compromis trouvé en commission permet de cranter cet objectif, sans affecter les finances publiques. La mission sur la refonte de la fiscalité locative, que la Première ministre a confiée à Marina Ferrari et à moi-même, afin de favoriser la location de longue durée, rendra ses conclusions au mois de mars, ce qui nous permettra de faire évoluer la proposition de loi au cours de la navette parlementaire.