Il est donc indispensable de tenir compte des réalités et des contraintes ultramarines aussi bien globalement, en termes de vie chère au quotidien, qu'économiquement, en termes de charges assumées par des exploitants que limite déjà la taille physique du marché local. Ces charges croissant, je le répète, la hausse des taux de location imposés par les distributeurs ferait mécaniquement baisser plus encore les revenus des exploitants. Laisser faire mettrait en péril la viabilité économique de la très grande majorité de ces diffuseurs de la culture et fragiliserait immédiatement la filière. En outre, pour les distributeurs, l'enjeu est très relatif : l'outre-mer ne représente selon le CNC que 2 % des entrées nationales, et ils demeurent en mesure, contrairement aux exploitants, de développer leur activité dans des territoires où elle serait plus rentable.
Soyons clairs : économiquement, l'amplification de cet état de fait fera disparaître les petits cinémas, tandis que les autres ne subsisteront qu'en augmentant leurs tarifs jusqu'à 18 euros le ticket, dans un contexte socio-économique très dégradé. Socialement, la diminution de l'activité cinématographique se traduira par une hausse du chômage, tandis que les familles ne pourront plus, en raison du prix insupportable des entrées, accéder à cette activité de bien-être. Culturellement, elle supprimera une bonne partie de l'offre cinématographique pourtant vecteur de culture, accentuant sa rareté et appauvrissant la diversité culturelle en outre-mer. Elle entraînerait une discrimination et une rupture de l'accès au septième art pour tous
Une telle situation provoquerait un accroissement des inégalités et des discriminations, une augmentation des écarts en matière de niveau de vie et d'accès à la culture entre Français de l'Hexagone et d'outre-mer. Il en résultera aussi un renforcement des tensions sociales, alors que le cinéma constitue un moyen de se libérer du mal-être individuel et collectif accumulé au quotidien.