Intervention de Johnny Hajjar

Séance en hémicycle du mardi 5 décembre 2023 à 15h00
Pérennité des établissements de spectacles cinématographiques et accès au cinéma dans les outre-mer — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJohnny Hajjar, rapporteur de la commission des affaires culturelles et de l'éducation :

Maud Petit et moi présentons en effet cette proposition de loi aux enjeux à la fois économiques, sociaux et culturels pour les collectivités relevant de l'article 73 de la Constitution : elle vise, dans l'intérêt général, à préserver les établissements de spectacles cinématographiques. Il s'agit en particulier de préserver l'emploi dans ce secteur, de protéger les populations ultramarines qui sans cela subiraient une augmentation des tarifs, tout en garantissant la distribution d'une offre culturelle et l'accès pour tous à la culture par le cinéma dans les outre-mer.

Art du spectacle, septième art, expression du génie humain, le cinéma constitue une composante indispensable du bien-être et de la qualité de vie, particulièrement outre-mer, où l'offre culturelle reste, hélas, historiquement et structurellement restreinte. Il joue un rôle essentiel en matière de développement personnel, d'enrichissement culturel ; c'est pourquoi une société démocratique et humaniste doit garantir sa diffusion et son accessibilité.

Or, dans les outre-mer, bénéficier d'un accès au cinéma et d'une offre cinématographique à un tarif supportable pour tous demeure un défi majeur ; en raison des singularités de nos territoires – l'insularité, l'exiguïté des marchés intérieurs, le contexte de vie chère exacerbée –, le marché socio-économique pour diffuser et développer la culture par le cinéma y demeure restreint.

Au niveau de vie inférieur à celui de l'Hexagone, à la cherté écrasante de la vie, s'ajoute une inflation bien plus importante outre-mer, alourdissant encore les charges de fonctionnement et d'investissement des exploitants : le rapport Tirot, puis le rapport d'information sur le coût de la vie dans les outre-mer, n'ont fait qu'objectiver une situation connue de tous. Pour bien comprendre, il convient de rappeler que la diffusion d'une œuvre cinématographique suppose la coopération de trois acteurs : son producteur, le distributeur chargé de sa commercialisation et l'exploitant de salles de cinéma qui le programme dans ses établissements. Après déduction des taxes, les recettes perçues sur la vente des billets d'entrée sont réparties principalement entre ces deux derniers en fonction du taux de location, qui détermine la part du distributeur.

Traditionnellement, pour tenir compte des contraintes propres à ces territoires, ce taux se négociait outre-mer autour de 35 % hors taxes. Cependant, depuis la crise du covid, et dans une logique de maximalisation de leur rentabilité, les grands distributeurs réclament des taux supérieurs, avoisinant régulièrement 50 %, afin de les aligner sur ceux pratiqués dans l'Hexagone. Pour survivre, les exploitants ultramarins, soumis à un rapport de force très déséquilibré et inégal, doivent se plier aux exigences de multinationales américaines, comme Warner Bros, dont le chiffre d'affaires atteignait 34 milliards de dollars en 2022. Cette situation est intolérable : l'uniformité ne peut être la norme. Vous le savez, l'équité consiste à ne pas appliquer le même traitement à des situations différentes.

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