Intervention de Gérald Darmanin

Réunion du lundi 27 novembre 2023 à 16h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur et des outre-mer :

Je me range à la proposition de modification de l'article 1er A faite par le rapporteur général, et j'émets par conséquent un avis défavorable aux amendements de suppression. Tout d'abord, de nombreux pays fixent des quotas indicatifs. Par ailleurs, monsieur Vallaud, nous avons veillé à exclure l'immigration familiale et l'asile du champ des quotas. Il s'agit de quotas économiques ou étudiants, qui correspondent à la politique menée par le Gouvernement depuis le comité interministériel sur l'immigration et l'intégration du 6 novembre 2019, sous la présidence d'Édouard Philippe et rapporté par mon collègue Christophe Castaner : il avait approuvé le principe d'un débat annuel au Parlement, permettant de fixer annuellement des cibles et des quotas non limitatifs, conformément à l'engagement pris par le Président de la République il y a quatre ans. Cela prouve également que nous ne faisons pas, sur l'immigration, une loi par an, mais une tous les six ans. C'est lorsque vous étiez en responsabilité, monsieur Lucas, qu'une nouvelle loi sur l'immigration était adoptée chaque année – tous les un an et demi sous M. Hollande, contre six ans pour M. Macron, la dernière étant celle de Gérard Collomb, pour qui j'ai une pensée.

Deuxièmement – je le dis au groupe du Rassemblement national et à Mme Diaz –, aucun pays au monde n'a instauré de quotas prescriptifs, lesquels contribuent à augmenter l'immigration légale. Ainsi, votre amie Mme Meloni vient de prendre un décret visant à augmenter les quotas d'immigrés légaux admis sur le territoire italien, soit 136 000 personnes acceptées en 2023, 151 000 en 2024 et 165 000 en 2025. Mme Meloni ne confond pas, comme vous le faites, immigration légale et illégale, ainsi que M. Gouffier Valente l'a rappelé.

Madame Genevard, à notre connaissance, aucun pays n'a instauré de quotas prescriptifs, au sens d'un plafond, mais nous entendons ce que vous dites. Le Gouvernement n'a rien à cacher et pourrait fixer des quotas chaque année, voire sur trois années, à titre indicatif et afin de créer une dynamique, mais aussi afin de comprendre pourquoi ils ont été atteints ou pas.

Le professeur Mazeaud ayant effectivement alerté sur le caractère inconstitutionnel d'un débat obligatoire, je prends l'engagement, au nom du Gouvernement et tant que nous serons en responsabilités, que nous répondions chaque année, devant le Parlement, de notre politique migratoire : le ou la Première ministre demandera la tenue d'un débat au Parlement. Nous pourrons ainsi justifier du nombre de visas accordés. J'espère que l'amendement du rapporteur général sera adopté, mais même s'il ne l'est pas, cet engagement sera tenu.

Enfin, le 7 décembre prochain, nous débattrons, madame Genevard, de l'hypothèse d'une révision constitutionnelle. En tout état de cause, elle ne saurait s'appliquer à la question de l'asile, puisque cela supposerait aussi de modifier le préambule de 1946, la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 et la CEDH. Si la question se pose sans doute différemment sur l'immigration familiale, l'asile ne peut, par nature, pas être soumis à des quotas.

Je réponds également au député du groupe la France insoumise – en quête de statistiques sur les OQTF –, qui a évoqué des chiffres assez étonnants. Les derniers chiffres, les seuls disponibles pour les comparaisons de reconduites à la frontière, sont publics et connus ; provenant d'Eurostat, ils ne souffrent pas de contestation. En 2022, 14 235 éloignements ont eu lieu en France, pour 13 135 en Allemagne, soit 1 000 reconduites en moins, alors que ce pays connaît une immigration irrégulière deux fois plus importante : j'ignore donc d'où provient le chiffre de 26 000 que vous avez mentionné et je vous invite à faire preuve du souci d'exactitude que vous attendez des autres. Les chiffres sont de 10 490 pour la Suède, 4 515 pour l'Espagne et 2 915 pour l'Italie. S'il est exact que notre taux d'application des OQTF est faible, il est, malgré tout, le plus fort d'Europe.

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