Cette région est en effet la première à nous avoir invités à participer à l'ouverture de travaux sur le sujet, mais les deux autres ont très clairement affiché leur volonté d'aller dans le même sens. Je vous rejoins néanmoins : il n'y a pas encore eu l'once d'un début de travail pour instaurer cette contribution. Sauf que rien ne dit que d'autres régions ne suivront pas, une fois qu'un modèle aura été établi.
Nous devons également prendre en compte les travaux européens sur l'eurovignette, dont le système de contribution est fondé sur le nombre de kilomètres parcourus, à l'image des péages autoroutiers. Le principe de la contribution imaginée par la région Grand Est repose sur le même modèle. Ses recettes devraient être principalement, pour ne pas dire exclusivement, fléchées vers le financement des infrastructures routières nouvellement récupérées.
Nous nous posons la question de l'articulation entre l'eurovignette et ces dispositifs. Il nous semble en effet totalement impossible d'imposer une double taxation sur le même réseau, d'autant que nous devons également prendre en compte dans nos modèles les évolutions liées au système européen d'échange de quotas d'émission (ETS). En 2027, la taxation des producteurs pétroliers se répercutera sur le coût des carburants – c'est bien une taxe carbone sur les énergies fossiles.
Tout cela nous amène à nous interroger sur le surcoût que le transport routier devra supporter et sur les conditions dans lesquelles il pourra le répercuter, ce qui est la première problématique des transporteurs aujourd'hui. Alors que le secteur est massivement composé de petites structures, de moins de trente salariés en moyenne, les conditions de négociation avec nos grands donneurs d'ordre sont extrêmement complexes et tendues, d'autant plus en ce moment, où les volumes sont en forte baisse.
Parallèlement, pour répondre à votre première question, nos entreprises doivent relever un défi incontournable, celui de la décarbonation et de ce qu'elle impose en matière d'investissements. Dans le cadre du travail sur la feuille de route décarbonation, nous avons évalué son surcoût si nous devions respecter les échéances prévues par la stratégie nationale bas-carbone (SNBC) : il s'élève à 52,6 milliards d'euros. Aussi, nous nous demandons dans quelles conditions nous allons pouvoir nous inscrire dans la décarbonation, comment nous allons y être accompagnés et surtout si nos clients y participeront également. On ne peut pas imaginer que le seul secteur du transport routier l'absorbe.
S'agissant des énergies, nous voyons dans nos travaux qu'une orientation se dessine fortement vers le mode électrique. Nous pourrons en discuter et vous exposer quelles sont, selon nous, les échéances crédibles, qui sont un petit peu plus éloignées que celles programmées. Cela ne tient pas au fait que les véhicules n'existent pas – ce serait mensonger de dire que les constructeurs ne sont pas au rendez-vous de l'électrification, notamment en ce qui concerne les véhicules lourds de marchandises – mais un retard considérable a été pris sur les recharges des véhicules électriques lourds ; d'où l'importance de maintenir un mix énergétique. Je laisserai Florence Berthelot en dire plus sur ce sujet.