À l'époque, nous étions beaucoup plus optimistes. Il y avait une forme d'angélisme de la croissance verte, qui allait tout résoudre et apporter de nouvelles recettes. Il ne faut pas oublier que nous étions à un an et demi de l'échéance présidentielle. Or les premières années d'un mandat sont faites pour lancer des réformes et les autres pour essayer de ne pas perdre l'élection suivante, quel que soit le gouvernement.
Dans les faits, on était plus dans une forme de lyrisme que de solution pratique. Nathalie Kosciusko-Morizet a défendu l'écotaxe avec beaucoup de courage. Au départ, ce n'était pas évident. Tout le monde attendait l'arrivée de l'écotaxe, qui allait inciter au report modal. Je dirais que nous étions dans une forme d'illusion où la lutte contre le réchauffement climatique allait générer une autre économie et une autre croissance.
Aujourd'hui, dans un pays tel que la France, le transport routier semble malheureusement de plus en plus indispensable. Au niveau européen, on se heurte aussi par moments à des pays devenus ultralibéraux parce qu'ils ont connu la période communiste. Il est très intéressant de regarder le parcours de ces responsables qui ont été éduqués aux États-Unis et ne sont pas forcément confrontés aux problématiques d'un pays de plus grande superficie ou de transit. Pour reprendre l'exemple de l'Estonie, le transit est assez limité.
À cette époque, je pense qu'on a complètement sous-estimé les conséquences. Néanmoins, je ne parlerais pas de sous-estimation coupable parce que nous étions vraiment au tout début. C'est sous le gouvernement de Nicolas Sarkozy que le ministère de l'environnement a englobé pour la première fois le logement et le transport. Il ne faisait pas partie jusqu'alors des ministères de premier rang.
Au niveau européen, lors des discussions avec la Commission, je pense que nous étions beaucoup plus attachés à des problèmes d'ouverture du marché, de fin de l'étatisme, etc. Les questions climatiques et de protection de la nature apparaissaient en filigrane, mais elles constituaient davantage des figures imposées que la préoccupation principale. Aujourd'hui, les priorités ont changé.