Nous souhaitons que le rapport annuel du Gouvernement comprenne une évaluation de la situation démocratique et des caractéristiques propres à un État de droit dans les pays d'origine sûrs.
Le principe des pays sûrs est délétère pour le droit d'asile. Non seulement il prive les demandeurs d'asile d'une partie de leurs droits, en raison de délais de recours réduits, de l'absence de collégialité au sein de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) et de la possibilité d'expulsion pendant l'instruction du dossier, le recours devant cette cour n'étant pas suspensif, mais il porte aussi fondamentalement atteinte au principe de non-refoulement prévu par la convention de Genève.
La vie ou la liberté d'opposants politiques, de défenseurs des droits ou d'acteurs de la société civile ont été et sont menacées dans des pays dits sûrs. En Géorgie, la communauté LGBT subit des pressions et n'est pas protégée contre les attaques violentes de l'État. En Moldavie, les Roms sont exclus et discriminés.
Il aura fallu attendre une décision du Conseil d'État de juillet 2021 pour que soit annulée la décision du conseil d'administration de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) qui maintenait le Bénin et le Sénégal sur la liste des pays d'origine sûrs. On ne peut pourtant pas ignorer les manquements démocratiques, voire les dérives autocratiques, qui y ont lieu : oppositions politiques écartées, médias muselés et manifestations réprimées.
À défaut d'être supprimé, le principe des pays sûrs ne doit pas servir d'outil pour restreindre le droit d'asile, et encore moins de variable d'ajustement à une politique migratoire honteuse.