Alors que nous nous efforçons d'attirer des investisseurs, de prévenir les délocalisations et de promouvoir le dynamisme du tissu entrepreneurial local, il ne faut pas fragiliser l'économie française. À l'inverse, nombre d'entreprises enracinées dans les territoires, contribuent à la création d'emplois et constituent une ligne de défense contre la précarité.
Comme je l'ai fait en commission, permettez-moi d'évoquer l'usine LU Mondelez à Jussy, dans ma circonscription. À l'automne 2020, un incendie s'est déclaré sur ce site de production agroalimentaire, installé depuis un siècle dans l'Aisne ; il a détruit la moitié de l'outil de production et plusieurs bâtiments, occasionnant du chômage partiel.
Le siège du groupe Mondelez se trouve à Chicago, à 7 000 kilomètres de là. Vu de Chicago, le village de Jussy n'est qu'un point sur une carte de l'Europe. Si nous n'avions pas montré que l'investissement en France était profitable, que les retours sur investissement étaient réels, qu'une main-d'œuvre qualifiée et attachée à son métier était disponible, ce n'est pas en France que le groupe aurait réinvesti 50 millions d'euros et maintenu des centaines d'emplois.
La transparence sur les marges est nécessaire ; contraindre les groupes qui ne le font pas à publier annuellement leurs comptes l'est tout autant. En revanche, imposer une limitation à tout prix enverrait aux investisseurs un signal négatif pour l'économie. Au lieu d'imposer une régulation rigide des marges bénéficiaires des industries agroalimentaires, nous prônons une approche fondée sur la transparence, sur une surveillance renforcée et sur la stimulation de la concurrence. Une méthode à la fois plus adaptée et plus efficace, favorisant une compétition saine, la sauvegarde des petits acteurs, des bénéfices pour les consommateurs et la prévention des pratiques abusives.
S'agissant du prix plancher, vous allez tenter, monsieur le rapporteur, de rétablir une partie de l'article 1er , par voie d'amendement. Dans un esprit constructif et ouvert, j'ai sous-amendé votre amendement relatif aux indicateurs de prix, qui sont au cœur des négociations commerciales. Mais ne nous leurrons pas : le débat sur le partage de la valeur et la préservation des revenus des agriculteurs, seule source de leur émancipation et garantie importante pour les transmissions et les installations, ne sera possible qu'au prix d'une ultime réforme des négociations commerciales.
Nous enjoignons d'ailleurs le Gouvernement à s'engager à mener à bien une telle réforme en 2024. L'inaction du Gouvernement en ce domaine engendrerait une pluie de fausses solutions, toutes aussi nocives les unes que les autres pour le monde agricole : chasser les marges, multiplier les jachères, valider la stratégie européenne « de la ferme à la table », fermer les yeux sur l'accord avec le Mercosur, le Marché commun du Sud, qui se trame en coulisses, sortir de l'Europe et tuer la politique agricole commune (PAC). Elle ne ferait qu'entraîner les agriculteurs français vers une paupérisation massive !
L'adoption de cette proposition de loi, telle qu'amendée en commission et conférant à l'OFPM un rôle central dans la surveillance du marché agroalimentaire, constitue une étape significative vers un marché plus équitable et transparent. C'est pourquoi le groupe Les Républicains maintiendra la position adoptée en commission, à condition que les débats de ce jour ne s'écartent pas de l'esprit initial. Nous sommes résolus à faire progresser les mesures qui renforcent notre économie et préservent l'intérêt de nos concitoyens.