« L'État est là ! » ; « Un plan d'action spécifique pour les risques naturels sera traduit dans un projet de loi. » Ainsi Emmanuel Macron s'exprimait-il le 29 septembre 2018. Malgré cette promesse adressée à l'ensemble des outre-mer par le Président de la République, en tournée aux Antilles un an après le passage du terrible ouragan Irma, qui avait notamment frappé la Guadeloupe, Saint-Martin et Saint-Barthélemy, nous ne voyons toujours rien venir. « Anne, ma sœur Anne…»
En parallèle de cet engagement présidentiel relatif à une grande loi de prévention des catastrophes naturelles outre-mer – un vœu resté pieux, hélas –, la délégation sénatoriale aux outre-mer avait remis en 2018 un rapport comportant une soixantaine de recommandations pour mieux gérer les risques majeurs. Le Sénat avait publié l'année suivante un autre rapport parlementaire à ce sujet. Une délégation interministérielle spécifiquement dédiée à la prévention des aléas naturels outre-mer avait ensuite été créée, en 2019 également, avant d'être dissoute en 2021. C'est dire si une commission d'enquête à ce sujet est amplement justifiée !
L'urgence climatique est une réalité que nul ne peut nier. Ses effets graves et croissants, notamment pour ce qui est des catastrophes naturelles, portent atteinte à la sécurité des personnes et des biens. Surexposés à un large spectre de risques naturels majeurs, y compris celui de la neige, du fait de leur insularité, de leur relief et de leur faible superficie, ainsi qu'à des aléas multiples et cumulatifs, les territoires ultramarins sont en première ligne face à ce front climatique. Ils présentent une vulnérabilité plurielle et exacerbée, qui menace leurs populations, leurs économies locales et leurs écosystèmes riches et uniques, particulièrement fragiles.
Face à un tel niveau d'impréparation, jugé indiscutable, et face aux prévisions alarmistes, la démarche qui nous est proposée se veut résolument anticipatrice et volontariste. Il s'agit de « sortir de l'urgence permanente » qui prévaut dans nos territoires d'outre-mer, assurément les premières victimes du changement climatique. En effet, l'historique récent des risques et catastrophes naturels majeurs, aussi variés que dramatiques, dans nos différents territoires répartis sur les trois océans est une litanie non exhaustive des phénomènes climatiques et de leurs lourds bilans humains, matériels et financiers.
Face à ce constat alarmant, la question fondamentale est de savoir quels sont les moyens dont disposent les populations ultramarines pour assurer la sécurité des personnes et des biens. Nous partageons le constat que les moyens actuels ne sont pas à la hauteur des défis et des enjeux climatiques outre-mer. Par exemple, le plan séisme Antilles, datant de 2007, a été jugé trop lent et inefficace. Une commission d'enquête parlementaire est nécessaire pour faire la lumière sur cette « forme d'inaction de l'État qui pourrait s'apparenter à de la non-assistance à peuples en danger » – je reprends les mots du rapporteur. En d'autres termes, nous regrettons nous aussi un abandon des outre-mer par un gouvernement suspecté de manque d'anticipation et de défaillances face à des enjeux vitaux tels que la gestion de l'eau – problème connu à Mayotte depuis 1997 ; ma collègue Estelle Youssouffa ne me contredira pas.
Il est indéniable que la fréquence et l'intensité croissantes, voire exponentielles, de ces risques naturels majeurs ont des conséquences significatives et extrêmement graves pour les populations ultramarines, affectant directement ou indirectement la qualité de vie, la santé publique, l'économie, le tourisme, l'agriculture, l'aménagement du territoire et le développement durable, qu'il s'agisse de phénomènes météorologiques ponctuels ou de calamités prolongées telles que la grave sécheresse qui persiste non seulement à Mayotte, mais aussi en Guadeloupe – mes collègues Olivier Serva et Max Mathiasin ne cessent de la dénoncer.
Surexposés, les territoires ultramarins sont pourtant des exemples de résilience et des laboratoires que l'État devrait mettre à profit comme zones d'expérimentation de bonnes pratiques face au changement climatique. Pour saisir cette occasion, pour capitaliser les expériences et l'expertise ultramarines et faire de nos handicaps des atouts, il faut toutefois des moyens humains, techniques et financiers adaptés et proportionnés, alloués dans le cadre de solutions que nous construisons tous ensemble.
Par deux amendements rédactionnels – l'un sur l'article unique, l'autre sur le titre –, ma collègue Nathalie Bassire, députée de La Réunion, et moi-même proposons de faire référence aux collectivités concernées en employant une expression juridiquement juste et politiquement neutre, à savoir « relevant des articles 73 et 74 ainsi que du titre XIII de la Constitution », en sus du terme « d'outre-mer », plutôt issu du langage courant. Cette troisième voie sémantique et consensuelle vise à rassembler la représentation nationale le plus largement possible en vue de l'adoption de la proposition de résolution.
Comme il l'a fait en commission, le groupe Libertés, indépendants, outre-mer et territoires soutiendra celle-ci, tant elle est nécessaire.