Intervention de Hadrien Clouet

Séance en hémicycle du mardi 28 novembre 2023 à 21h30
Conférence sur l'avenir de l'europe — Motion de rejet préalable

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaHadrien Clouet :

Ce principe de contrôle des budgets nationaux est repris dans les 340 pages de conclusions que vous nous soumettez, dont j'imagine que la plupart des collègues ici présents ne les ont pas lues – pas d'inquiétude, nous l'avons fait pour vous –, aux propositions 8.6, 11.3 et 29.1.

Le Semestre européen, ce mécanisme de contrôle et de surveillance, est pourtant à l'agonie : 170 violations des règles budgétaires ont été comptabilisées au cours de la décennie précédente, sans que n'advienne, évidemment, la fin du monde annoncée. De ces difficultés découle la réforme en cours, qu'avalise votre résolution : dorénavant, le moindre euro dépensé en trop sera directement converti en fermetures de gares ou d'hôpitaux, ou en annulations d'investissements. Tel est le programme de la Commission européenne, auquel le texte qui nous est soumis n'oppose aucune objection de principe, contradiction concrète, ni objectif alternatif. Alors qu'il nous faut consacrer des milliards d'euros à la bifurcation écologique, la Commission européenne étouffe tout État qui entendrait se mettre sérieusement au travail. Mais soyons justes, chers collègues. Emmanuel Macron et son gouvernement ne sont pas les seuls en cause : il y a dans les institutions européennes des petits Macron qui partagent la même obsession pour la rigueur budgétaire, l'austérité et la liquidation du service public.

Comme si cela ne suffisait pas, voici que votre résolution et les 340 pages de conclusions qui nous sont indirectement soumises appellent à élargir l'Union européenne à d'autres États, habilement sélectionnés par la Commission européenne. Sur quels critères les candidats à l'adhésion sont-ils retenus ? Leur système de sécurité sociale ou leur niveau de salaire ? Pas du tout : alors qu'un pays comme la Moldavie maltraite ses salariés en limitant son salaire minimum à 200 euros par mois, certains esprits brillants veulent l'intégrer au marché unique. Leurs valeurs, comme le prétendait Mme la secrétaire d'État dans son intervention liminaire ? Consultons ensemble la revue d'évaluation de la candidature serbe par la Commission européenne, laquelle n'est publiée qu'en anglais – il ne manquerait plus que les électeurs puissent se la procurer et la lire. Elle indique que des progrès ont été faits dans la privatisation des entreprises publiques, ce qui est un bon point pour un pays candidat à l'adhésion, mais qu'il faut néanmoins contenir les dépenses salariales dans le PIB – manière savante de dire qu'il faut réduire la rémunération des travailleuses et des travailleurs. On y trouve également des cas concrets : on y lit que la modernisation de l'aéroport Nikola Tesla de Belgrade a considérablement avancé grâce à la concession à Vinci Airports – on est ici entre amis –, notamment s'agissant de ses pistes, de son terminal passagers et de son unité de traitement des eaux. L'Europe qui protège, c'est donc surtout celle qui vend à la découpe.

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