Intervention de Jean-Louis Bourlanges

Séance en hémicycle du mardi 28 novembre 2023 à 21h30
Conférence sur l'avenir de l'europe — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Louis Bourlanges, rapporteur de la commission des affaires étrangères :

La Conférence sur l'avenir de l'Europe a publié un rapport très riche relatif aux orientations souhaitables de l'Union européenne (UE) telles qu'elles étaient perçues par les citoyennes et les citoyens de l'Union associés à cette grande et féconde consultation. Je remercie le président Anglade et Mme Laernoes d'avoir pris l'initiative de proposer, dans le cadre de la commission des affaires européennes, une proposition de résolution européenne à ce sujet. La commission des affaires étrangères l'a accueillie bien volontiers et m'a chargé d'en être le rapporteur. J'ai plus particulièrement axé ma réflexion sur un aspect précis – sans doute le plus urgent, puisque le Conseil européen doit en délibérer dans les prochains jours : celui des défis lancés à l'Union européenne par l'élargissement à l'Ukraine et à la Moldavie ainsi qu'aux pays des Balkans occidentaux.

L'exercice auquel nous nous livrons en examinant cette proposition de résolution européenne a été doublement balisé. Rappelons d'abord que, si intéressants que soient ses travaux, la Conférence sur l'avenir de l'Europe n'est qu'une instance de consultation, et son rapport, une contribution au débat. Ne confondons pas ici l'enrichissement d'un débat ouvert à tous et les décisions politiques, qui relèvent des seules autorités institutionnelles compétentes des États – c'est-à-dire nous.

La seconde limite tient, je l'ai dit, à un effort de concentration sur le dossier européen le plus brûlant du moment, celui de l'élargissement. À nos yeux, l'objet principal de cette résolution européenne ne pouvait être de faire une revue de détail, laudative ou critique, des politiques désirables de l'Union. Il s'agissait d'aller à l'essentiel et de définir un processus d'élargissement qui soit à la fois ambitieux et responsable.

Nous sommes en effet confrontés à un double devoir, d'urgence et de prudence : urgence géopolitique s'attachant à l'intégration d'États que nous ne pouvons, dans leur intérêt comme dans le nôtre, laisser seuls face aux États prédateurs que sont la Russie, la Chine ou même la Turquie ; prudence institutionnelle, car l'Union ne résisterait ni à l'introduction rapide d'États n'ayant pas mené à son terme le processus de modernisation démocratique, ni à la reconduction pure et simple d'un système institutionnel qui n'a jamais été conçu pour gérer une trentaine d'États membres.

La méthode que je préconise dans le rapport que j'ai présenté à la commission des affaires étrangères, fondée sur la flexibilité et la progressivité, me paraît être la seule à pouvoir concilier ces deux objectifs. Nos deux commissions, celle des affaires étrangères et celle des affaires européennes, proposent de fractionner le processus d'adhésion en trois étapes, en vue de répondre de toute urgence à certains États – ceux des Balkans et l'Ukraine – dont les besoins géopolitiques sont évidents, sans pour autant précipiter un accès, qui serait dès lors prématuré, aux institutions de l'Union.

Il faut envisager en premier lieu une phase d'engagement politique, au cours de laquelle les États concernés souscriraient à un pacte d'adhésion à l'Union européenne et prendraient des engagements sans équivoque sur les principes qui la guident, sur la souveraineté des États, sur le respect des droits fondamentaux, sur la reprise de l'acquis institutionnel de l'Union, sur la primauté du droit communautaire et sur l'établissement de relations pacifiées avec chacun de leurs voisins.

Viendrait ensuite une phase d'intégration à la carte, au cours de laquelle s'organiserait bilatéralement, entre la Commission européenne et chaque État candidat, la mise en œuvre des politiques communes que ces États seraient en mesure d'intégrer.

Enfin interviendrait l'adhésion pleine et entière aux institutions de l'Union. Elle serait l'aboutissement d'un double processus, de révision de nos institutions et de réalisation de toutes les conditions nécessaires à un bon fonctionnement de la démocratie. Une attention particulière devrait être portée à l'éradication de la corruption.

La proposition de résolution européenne qui vous est soumise repose sur la conviction qu'entre l'immobilisme et l'aventure, il y a nécessairement un moyen terme. De même que le rapport dont je l'ai accompagnée, elle n'a d'autre ambition que de contribuer à éclairer le chemin qui pourrait y conduire.

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