Avec ma collègue Eva Sas, nous avons souhaité étudier le budget des transports à la lumière du dérèglement climatique. Rappelons que le secteur des transports est à l'origine de près d'un tiers des émissions nationales et que ses émissions augmentent.
La stabilité des crédits du programme 203 Infrastructures et services de transports, masque une augmentation, certes modérée une fois neutralisé l'impact de la compensation exceptionnelle aux autorités organisatrices de la mobilité, intégrée à la loi de finances initiale pour 2023, à hauteur de 300 millions. Hors la non-reconduction de cette mesure, les crédits de paiement du programme augmentent ainsi de 314 millions d'euros, soit 8 %, qui se répartissent de la manière suivante : 238 millions d'euros d'augmentation de la part des péages ferroviaires acquittée par l'État, en raison de l'augmentation de la couverture du coût du réseau par les péages ferroviaires, comme prévu par le contrat de performance signé avec SNCF Réseau ; 50 millions d'euros supplémentaires de compensation à SNCF Voyageurs du déficit d'exploitation des trains d'équilibre du territoire (TET) ; 23 millions d'euros pour le Charles-de-Gaulle express ; 10 millions d'euros pour la mesure « pass jeunes » ; 10 millions d'euros pour l'expérimentation du titre unique de transport.
Les recettes de l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF) devraient croître significativement et atteindre 4,6 milliards d'euros en 2024, dont 600 millions d'euros issus de la nouvelle taxe sur l'exploitation des infrastructures de transport de longue distance prévue dans le PLF pour 2024. J'utilise le conditionnel car il s'agit de fonds de concours et, pour l'instant, nous n'en avons pas trace.
L'Autorité de régulation des transports (ART) voit sa subvention augmenter de 1 million d'euros pour atteindre 15 millions d'euros, mais elle estime avoir besoin de 18,6 millions d'euros. Nous déplorons que sa subvention ait peu évolué au cours des dernières années, en dépit de l'inflation et des missions supplémentaires qui lui ont été conférées.
La hausse modérée des crédits du budget annexe Contrôle et exploitation aériens résulte d'une accumulation de petites augmentations de dépenses d'investissement dans les systèmes de navigation aérienne, de dépenses de personnel à la suite de la signature d'un nouveau protocole social, et de dépenses de fonctionnement en raison de l'évolution dynamique des taux d'intérêt.
Nous saluons les annonces faites par le Gouvernement d'un investissement de 100 milliards d'euros à venir dans les transports, notamment dans le ferroviaire, mais nous attendons d'en voir la concrétisation.
Ce PLF est très insatisfaisant : l'augmentation de la compensation de l'État pour la part des péages qu'il acquitte risque de se répercuter sur le prix des billets de train, donc sur les usagers ; les investissements dans les trains de nuit restent modiques ; le Charles-de-Gaulle express est une liaison coûteuse et inutile. Si 300 millions d'euros supplémentaires devraient être consacrés à la régénération du réseau ferroviaire par SNCF Réseau, ils sont financés par le fonds de concours issu du groupe SNCF, c'est-à-dire, pour partie, par une augmentation du tarif des TGV.
Nous déplorons les investissements limités en faveur du vélo, par rapport aux besoins d'aménagements cyclables nécessaires. Nous regrettons également que les fonds consacrés aux mobilités actives ne concernent que très peu la marche, grande oubliée des politiques de mobilité. Le transport fluvial pâtit d'une insuffisance d'investissements au regard de son potentiel et de la place de choix qu'il peut occuper dans le développement des transports combinés. Par ailleurs, les 765 millions d'euros annoncés sur l'ensemble de la durée 2023-2027 – des prochains contrats de plan État-région (CPER) ne permettront pas de déployer les services express régionaux métropolitains (SERM) à court ou à moyen terme, alors que l'entrée en vigueur des zones à faibles émissions mobilité (ZFE-m) les rendrait particulièrement nécessaires. Comment expliquer aux plus démunis, qui possèdent un véhicule polluant, qu'ils doivent renoncer à leur véhicule si on ne leur propose pas d'alternative en transports en commun ?
Pour toutes ces raisons, nous vous appelons à voter contre les crédits de la mission Écologie, développement et mobilités durables.
Nous ne sommes pas opposées au vote des crédits du budget annexe Contrôle et exploitation aériens. Nous appelons à lever des recettes fiscales supplémentaires pour financer les nécessaires investissements dont les transports écologiques, au premier rang desquels le transport ferroviaire, ont besoin. La nouvelle taxe sur les infrastructures de transport de longue distance va dans le bon sens, mais son rendement attendu est sans commune mesure avec le montant des privilèges fiscaux dont bénéficie le transport aérien, qui s'élèverait à près de 5 milliards d'euros chaque année.