Tout d'abord, notre rôle est de faire en sorte que les producteurs – et surtout les techniciens de développement, qui accompagnent les 100 000 producteurs au sein des coopératives et dans les chambres d'agriculture – disposent des outils et des références adéquats. Il faut créer des références transposables, reconductibles, sans faire prendre aux agriculteurs des risques inconsidérés. Lorsque nous leur conseillons certaines pratiques, nous devons être sûrs de ce que nous disons, et l'avoir vérifié plusieurs fois.
Pour les cultures d'oléoprotéagineux, on estime à environ 300 le nombre de territoires homogènes pour lesquels les références doivent être établies, sur les 400 territoires agricoles que compte la France. Dans ces territoires différents, nous devons être en mesure d'apporter des références solides aux agriculteurs.
Deuxièmement, il existe cinq plateformes permettant d'optimiser les systèmes de culture, qui travaillent sur cinq bassins représentatifs. Le projet a commencé en 2014 : il a fallu près de dix ans pour accumuler suffisamment d'informations afin de pouvoir transmettre des données statistiques aux agriculteurs. La diversification est essentielle : aucune solution combinatoire ne peut être trouvée sans créer la multiperformance des systèmes dans lesquels on travaille. Les phytosanitaires sont un outil parmi d'autres, dans un combat global pour atteindre des objectifs de production.
Troisième élément : nous intervenons à condition de disposer de connaissances – biologiques, écologiques, éthologiques, de physiologie végétale – qui nous sont fournies. Nous travaillons donc après la recherche académique, en recherche et développement, en recherche applicative, et nous trouvons des solutions techniques en les mettant à l'épreuve.
Nous manquons cependant de connaissances pour de nombreuses espèces. Par exemple, dans la filière des oléoprotéagineux, nous avons beaucoup de connaissances sur le colza – suffisamment pour créer le colza robuste, réduire les phytosanitaires ou adapter l'agronomie –, mais ce n'est pas le cas sur les légumineuses. De même, nous manquons de connaissances s'agissant des ravageurs, qui évoluent beaucoup en fonction du changement climatique : la recherche publique ne se consacre quasiment pas aux insectes. Lorsque l'on se tourne vers la recherche étrangère, souvent, la question n'est plus discutée en dehors de l'Europe, puisqu'il y a des OGM (organismes génétiquement modifiés) pour les principaux ravageurs. Il est inutile de chercher des entomologistes pour nous fournir les données. Nous manquons de programmes de recherche pour nous fournir les informations que nous prendrons en compte dans nos approches techniques.
En aval, nous devons transférer ces connaissances vers les agriculteurs : un vrai problème de compétences se pose de la part de ceux qui effectuent le transfert technique, pour s'assurer qu'ils intègrent les nouvelles modalités, beaucoup plus complexes qu'une approche allopathique. Aujourd'hui, les solutions relèvent d'une approche combinatoire agronomique. Or nous manquons de formations d'agronomie pour traiter ces problèmes en profondeur.