Vous avez raison, les normes et les valeurs de l'Union européenne sont ce qui nous rassemble et seront le socle des critères prioritaires. La valeur première et sur laquelle tous les États membres se retrouvent unanimement lorsqu'il est question d'élargissement est l'État de droit, c'est-à-dire l'indépendance et l'impartialité de la justice, l'indépendance et la pluralité des médias, la lutte contre la corruption et des processus électoraux protégés des ingérences étrangères. Il s'agit du socle sur lequel repose notre Union européenne et c'est sur ces conditions que nous sommes le plus exigeants envers les pays candidats. Nous y avons d'ailleurs intérêt car plus l'État de droit est renforcé dans chacun des pays qui sont à nos frontières, moins nous aurons de soucis. Je rappelle en effet qu'un tiers environ des habitants de l'Union européenne vivent près d'une frontière.
Au-delà de l'acquis communautaire, nous attendons le plan de croissance que la Commission européenne dédie aux Balkans occidentaux et ce qu'elle entend consacrer à l'Ukraine et à la Moldavie, mécanisme qui ressemble beaucoup au plan de relance que les Européens ont instauré au lendemain de la crise de la Covid-19. Le principe en est très simple : soutien financier contre réformes, avec des jalons, des échéances et des dates butoirs très précis.
Surtout, le processus est désormais réversible. Ainsi, certains pays de l'Est faisant l'objet d'une procédure pour manquement à l'État de droit ne touchent pas les fonds européens, ce qui les incite à se remettre en ligne avec les normes européennes, notamment dans le domaine de la justice. Si donc nous constatons que l'État de droit recule, qu'une réforme de la justice diminue l'impartialité des juges ou que le politique essaie de se mêler des médias, nous retirerons des moyens financiers et ferons reculer les pays fautifs sur le chemin vers l'adhésion. Ce processus, incitatif sans être naïf, est parfaitement maîtrisé.
En ce qui concerne l'agriculture, la Commission européenne a engagé une revue des politiques européennes, qui devrait être rendue en mars 2024. Ce doit être la base de nos travaux quant à l'évolution de ces politiques dans la perspective de l'élargissement. Une ou deux législatures seront sans doute nécessaires pour y parvenir en toute transparence. À cette fin, des rendez-vous fréquents seront pris, non seulement avec le Parlement européen mais aussi avec votre commission et avec celle des affaires européennes.