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Intervention de Charles de Courson

Séance en hémicycle du lundi 10 octobre 2022 à 16h00
Projet de loi de finances pour 2023 — Discussion générale commune

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCharles de Courson :

Quelles sont les quatre principales critiques que l'on peut adresser au projet de loi de programmation pour les années 2023 à 2027 et au projet de loi de finances pour 2023 ?

La première concerne les collectivités locales. Vous persistez dans la voie du jacobinisme. Ces deux textes sont fondamentalement contraires aux principes fondateurs d'une démocratie locale vivante en général, et de son volet décentralisateur en particulier.

En premier lieu, l'article 23 du projet de loi de programmation s'inscrit dans votre logique de réduction des marges de manœuvre des élus locaux : c'est un nouvel avatar des contrats de Cahors, qui furent un échec. Pourquoi voulez-vous rétablir une tutelle des collectivités locales, alors qu'elles dégagent un excédent de fonctionnement ? Cet excédent leur permet d'avoir un taux d'autofinancement élevé et de ne pas peser sur les déficits publics. En outre, la dette publique locale représente une faible part du PIB – inférieure à 10 % – et en déclin selon vos prévisions. C'est un non-sens. J'espère que le rejet de cet article à une très large majorité de la commission des finances incitera le Gouvernement à renoncer à ce funeste projet.

En second lieu, vous poursuivez le démantèlement de la fiscalité locale, en supprimant la CVAE et la taxe d'habitation. En six ans, de 2017 à 2023, la part de la TVA nationale reversée aux collectivités locales pour compenser notamment ces suppressions d'impôts sera passée, selon vos prévisions, de 0 % à près de 25 %, atteignant 52,7 milliards d'euros, soit le tiers des impôts et taxes locales.

Deuxième critique, vous réduisez des impôts à crédit, sans diminuer le taux global des prélèvements obligatoires, au lieu de réduire en priorité le déficit public. Globalement, le taux prévisionnel de prélèvement obligatoire de 2023 sera de 44,7 % du PIB, soit son niveau de 2018. Où est la réduction ? En fait, vous n'avez consenti qu'une moindre hausse des prélèvements obligatoires, mais pas une diminution. Est-il sérieux de supprimer en deux ans la CVAE pour un coût brut de 8 milliards, d'achever la suppression de la taxe d'habitation pour 2,8 milliards en 2023, et de supprimer la redevance audiovisuelle pour 3 milliards, alors que le déficit public en 2023 est maintenu – en apparence – à 5 % ?

La trajectoire que cette politique dessine entre 2023 et 2027 confirme notre retard par rapport à nos partenaires européens. Le Gouvernement ne prévoit un retour à un niveau de déficit public inférieur à 3 % du PIB qu'en 2027, tandis que tous nos voisins visent à y revenir d'ici à 2025. Nous serons donc, éventuellement, les derniers de la classe.

Troisième critique : vous augmentez les dépenses publiques de façon excessive. Comme l'a souligné le Haut Conseil des finances publiques, l'affichage d'une baisse en volume de 1,5 % des dépenses publiques est une présentation fallacieuse. Si l'on utilise le déflateur de prix du PIB, bien plus représentatif que l'indice des prix à la consommation, et si l'on élimine le coût des mesures liées à la crise énergétique, cet affichage dissimule une augmentation de 0,7 % des dépenses publiques, peu différente de la croissance du PIB en volume, égale à 1 % d'après vos prévisions. Ce taux risque d'ailleurs de se dégrader.

Dernière critique : vous ne cherchez ni à faire des économies structurelles, ni à territorialiser et à mieux calibrer les aides face à l'inflation ; vos mesures sont générales et uniformes. Ainsi, l'indexation du barème de l'impôt sur le revenu bénéficie à tous de façon indifférenciée : pourquoi ne pas l'avoir modulée en fonction des situations, comme le propose l'amendement du groupe Libertés, indépendants, outre-mer et territoires adopté en commission ? La même logique s'applique au bouclier tarifaire, dont le coût brut est de 45 milliards. Des mesures courageuses consisteraient à concentrer les aides vers nos concitoyens les plus en difficulté ; ce serait plus juste socialement et plus économe des deniers publics.

En l'état actuel des deux textes, le groupe Libertés, indépendants, outre-mer et territoires ne pourra voter en leur faveur.

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