Emmanuel Macron a surestimé notre capacité à changer la donne stratégique dans la région – et je ne parle pas de sa volonté d'externaliser une partie de notre diplomatie au profit de l'Union européenne, dont l'action dans cette région est, une fois de plus, un échec. Plus grave, cette stratégie va à l'encontre des intérêts de notre pays.
Malgré ce constat accablant, il n'y a pas – j'aime à le répéter – de fatalité : dans ce domaine aussi, d'autres choix politiques peuvent aboutir à d'autres résultats. Il y a en revanche une forme d'urgence car nos compétiteurs ne nous attendent pas et, comme il est compréhensible, les Africains se tournent vers les puissances qui paraissent le plus en mesure de leur apporter les soutiens dont ils ont besoin. Néanmoins, notre pays dispose sur le continent d'un capital d'histoire et de langue partagées, dont j'ai la conviction qu'il nous permet toujours de nous inscrire dans le temps long de l'Afrique et de ne pas désespérer. J'entends donc proposer ma vision d'une relation entre la France et l'Afrique, qui récuse les repentances infondées et les nostalgies d'antan.
Avec la même conviction, je récuse l'inscription de la relation franco-africaine dans un cadre multilatéral désincarné qui impose au continent des modèles politiques, économiques et même anthropologiques qui ne tiennent pas compte de son génie propre. Comme je l'ai dit à cette même tribune il y a tout juste un mois, que ce soit en Afrique ou dans d'autres régions du monde, la politique étrangère de la France doit s'enraciner dans la reconnaissance préalable de deux certitudes : l'existence des nations participe à la diversité du monde et donc à la richesse de l'humanité ; la considération des peuples et le respect des nations sont des principes essentiels à la paix et l'harmonie du monde.
Vous le savez, c'est cette réflexion sur les relations internationales, en particulier les relations entre la France et les pays africains, qui m'a amenée à rédiger une déclaration des droits des peuples et des nations, outil juridique qui pourrait venir demain compléter le droit international. Entre l'utopie d'une coopération aseptisée par la médiation d'un multilatéralisme anonyme et une Françafrique qui ne peut et ne doit plus exister, j'ai la conviction qu'il y a la place pour créer, entre nos pays, une relation adulte, basée sur la prise en compte des réalités et des intérêts légitimes, et dont les grands principes sont précisément contenus dans cette déclaration.
C'est aussi cette conviction qui m'a amenée à proposer, il y a plusieurs mois, lors de mon voyage au Sénégal, que l'Afrique puisse bénéficier d'un siège de membre permanent au sein du Conseil de sécurité des Nations unies. Je réaffirme ici, comme je l'avais fait devant feu le président Déby,…