« Si tu veux aller vite, marche seul, mais si tu veux aller loin, marchons ensemble. » : cette phrase définit l'esprit de notre ambition pour le continent africain. Pour la concrétiser et pour débattre de nos relations avec les pays d'Afrique, nous devons garder en mémoire deux vérités essentielles. D'abord, ces relations ne peuvent reposer sur des caricatures. Ensuite, les réponses aux défis du XXI
S'affranchir des caricatures, pour commencer, c'est cesser de considérer le continent africain à travers le seul prisme sécuritaire. Je le dis en tant que membre de la commission de la défense nationale et des forces armées : les coups d'État qui ont gangrené le Sahel ces dernières années ne doivent pas nous aveugler quant à la richesse et à la diversité de ce continent où, comme le Président de la République le rappelait en 2017 à Ouagadougou, « se joue une partie de notre avenir commun ».
J'ajoute que trop souvent, les contrevérités s'accumulent. D'aucuns voudraient remettre en cause la légitimité ou l'efficacité de nos opérations au Sahel, mais disons-le clairement : nos soldats ont lutté contre la menace djihadiste à la demande des États africains. Aux côtés des militaires des armées africaines et au péril de leur vie, nos soldats y ont remporté des victoires contre des groupes armés djihadistes. Je veux rendre hommage, au nom du groupe Horizons et apparentés, à ces soldats, aux blessés et à ceux qui ont perdu la vie au Sahel, ainsi qu'à leurs familles.
S'affranchir des caricatures, c'est aussi garder en tête la diversité des pays africains. Il n'y a pas une Afrique ; il y en a de nombreuses. La France entretient des liens avec chacun des cinquante-quatre pays du continent dans le cadre de relations bilatérales ; tous ont leurs spécificités et ce n'est qu'en refusant de réduire les relations franco-africaines à une seule situation que nous pourrons poser les bases saines de partenariats renouvelés avec eux.
Cette logique de partenariat a été clairement définie par le Président de la République le 27 février dernier. Elle vise à sortir d'une approche qui ne fait que conjuguer vision sécuritaire et aide au développement, imposée par les Français ou par les Européens, pour s'investir dans la coopération économique et culturelle en encourageant des projets favorables à la prospérité du continent. La politique étrangère de la France en Afrique doit mettre fin à la logique de l'évidence et se donner pour but d'avancer ensemble, main dans la main, en véritables partenaires. Nous disposons pour ce faire de nombreux atouts qu'il nous faut faire valoir. Il nous faut construire une nouvelle relation équilibrée, réciproque et responsable avec les pays africains.
Les domaines dans lesquels la coopération entre la France et les pays africains peut être renforcée sont nombreux : ils concernent la santé, la culture, le sport ou l'entrepreneuriat. Les États africains sont des terres d'optimisme et de volontarisme qui font actuellement face à une situation sans précédent compte tenu du nombre de défis – d'ordre climatique, démographique, sanitaire, éducatif, économique et sécuritaire – qu'ils ont à relever simultanément. Ce sont d'ailleurs autant de défis qui se présentent également à la France.
Pour agir dans cette direction, nous disposons de leviers et d'atouts que nous devons savoir mettre en avant : la langue française, que nous partageons avec l'Afrique francophone ; le million de Français de La Réunion et de Mayotte, qui vivent en Afrique et dont nous voulons renforcer l'intégration régionale ; et nos diasporas, aussi bien les Français vivant en Afrique que les Africains vivant en France. Le groupe Horizons et apparentés estime que nous pouvons développer une stratégie reposant sur trois piliers : la lutte contre le changement climatique, la jeunesse et la démocratie.
S'agissant du changement climatique, d'abord, le continent africain peut devenir un acteur majeur de la réduction des émissions de carbone. Il n'est finalement responsable que de 10 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre. Les États africains pourraient se développer rapidement sans répéter les erreurs d'un siècle de développement occidental fondé sur les énergies fossiles. Le One Forest Summit, organisé au Gabon les 1er et 2 mars 2023 à l'initiative des présidents gabonais et français, a été l'occasion de rappeler l'importance des forêts tropicales africaines, qui sont des puits de carbone à préserver. L'enjeu climatique est d'autant plus pressant sur un continent confronté davantage que d'autres aux contraintes du changement climatique ; c'est un enjeu de taille au vu d'événements météorologiques extrêmes, qui peuvent aggraver l'insécurité alimentaire, les déplacements de population et les conflits.
Du fait de son dynamisme démographique, le continent africain est le plus jeune du monde ; par conséquent, l'accompagnement de la jeunesse y est un enjeu majeur. La France souhaite continuer à s'impliquer aux côtés des États demandeurs, que ce soit dans la construction d'établissements scolaires, dans la diversification des offres de formations professionnelles ou dans les échanges scolaires et l'orientation. À ce titre, je rappelle que les universités françaises ont plaisir à accueillir un nombre toujours croissant d'étudiants africains : ils étaient 150 000 en 2021, soit 40 % de plus qu'en 2017.
Enfin, face à la recrudescence des coups d'État depuis 2020, la France doit soutenir le plus possible l'intérêt pour la démocratie. Plutôt que d'imposer et de proclamer ses valeurs, elle a la possibilité de soutenir des réseaux d'intellectuels et d'acteurs civils pour qu'ils fassent vivre la démocratie au niveau local. Au lendemain du sommet Afrique-France qui s'est tenu à Montpellier en 2021, réunissant des acteurs des sociétés civiles française et africaine, la Fondation de l'innovation pour la démocratie a été lancée à Johannesburg.
Par notre proximité, notre histoire commune et notre amitié, nous entretenons un lien unique avec les États africains. Ce lien doit inspirer la relation que nous voulons développer avec eux, notamment à travers des partenariats renouvelés, réciproques et équilibrés, respectant les intérêts de chacun. C'est une autre voie que nous devons emprunter, une voie ne réduisant pas l'Afrique à un terrain de compétition ou de rente, mais considérant les pays qui la composent comme des partenaires, avec lesquels nous partageons des intérêts et des responsabilités. C'est ainsi que nous nous unirons autour de cette envie d'Afrique.
Ainsi, dans le domaine économique et financier, la France a entamé en 2019, avec ses partenaires, la réforme du franc CFA : elle a mis fin à l'obligation de centralisation des réserves de change de la Banque centrale des États de l'Afrique de l'Ouest (BCEAO) sur un compte d'opérations ouvert auprès du Trésor français, et s'est retirée des instances de gouvernance de l'Union économique et monétaire ouest-africaine (Uemoa).