Intervention de François Schmauch

Réunion du jeudi 19 octobre 2023 à 9h00
Mission d'information de la conférence des présidents sur les capacités d'anticipation et d'adaptation de notre modèle de protection et de sécurité civiles

François Schmauch, docteur en sciences de gestion :

Lors de la mise en place des Sdacr, j'ai participé à une commission de la direction de la sécurité civile. Avec plusieurs officiers supérieurs de sapeurs-pompiers, nous étions partisans de produire un Sdacr très rigide, impliquant une obligation de délais, de moyens et d'effectifs, et presque de résultats. Pour des raisons diverses, cela n'a malheureusement pas eu lieu. Pour éteindre un feu, il faut pourtant un camion, 8 pompiers et un délai de 10 minutes d'intervention : c'est pourquoi le Sdacr autrichien fait 2 pages et le Sdacr anglais une seule. Le Sdacr français fait plus de 1 000 pages, mais il laisse la liberté aux structures départementales de faire ce qu'elles veulent. Lorsque j'ai soutenu mon mémoire, j'avais analysé 54 Sdacr : il n'existait aucune corrélation (de moyens, de délais d'intervention, etc. ) entre eux. Il en allait de même entre les différents Samu ou Smur. Il faut donc absolument reprendre la main sur le système, en imposant aux services incendie des objectifs de production minimaux.

En Allemagne ou en Autriche, la commune porte des obligations en moyens courants ; le Kreis ou canton l'aide s'agissant des moyens spéciaux ; le Land affecte les moyens très lourds qui ne servent presque jamais, et dont l'État fédéral passe commande. L'État fédéral allemand vient ainsi de commander près de 300 cellules mobiles d'intervention chimique (CMIC) et radiologique (CMIR) pour remplacer les équipements obsolètes du pays. Une hiérarchie des responsabilités existe donc, mais des règles minimales s'imposent à tous.

Il faut également recruter des volontaires pour que leur charge de travail diminue. Un corps de pompiers allemand, autrichien ou américain sort rarement plus de 100 fois par an. Lorsqu'en 1980, les Américains ont affecté le secours médical aux pompiers, le volontariat s'est « effondré », car le nombre de sorties avait considérablement augmenté. Une commission a donc été réunie, qui a mis en place une mesure financière et technique extrêmement simple pour résoudre le problème.

La crise est cependant inégale d'un département à l'autre. En Moselle, où l'organisation des pompiers reposait encore beaucoup sur des textes allemands à l'époque où j'y travaillais, les pompiers disposaient de moyens très conséquents. Lorsque je suis arrivé en Loire-Atlantique, j'ai découvert que ce département, pourtant de même population, de même superficie et de même tissu industriel (avec la sidérurgie et les mines en Moselle, et la construction de paquebots en Loire-Atlantique), disposait de moyens bien moindres. C'est ce qui m'a poussé à développer des analyses comparatives, pour finalement réaliser que le système français n'obéissait à aucune logique.

Ce constat n'est pas nouveau. Déjà, entre les deux guerres, le général Pouderoux, des pompiers de Paris, réclamait que des moyens minimaux soient imposés aux collectivités.

On sait bien qu'aujourd'hui le volontariat s'effondre. À effectifs constants, le nombre d'interventions est passé de 200 000 dans les années 1950 à 5 millions aujourd'hui. Il y a vraiment « péril en la demeure ».

Une différence importante doit être tracée entre les moyens à disposition et les moyens qui devraient être disponibles, au regard d'obligations de délais d'intervention (de 10 à 12 minutes pour les ambulances ou les autopompes, etc.).

La départementalisation ayant créé des frais de structure considérables pour les départements, dont les budgets sont contraints, 5 000 casernes de pompiers ont été fermées ces dernières années, pour tenir les budgets. De même, les matériels sont diminués et les plans d'équipements sont affaiblis, à 600 ambulances par an désormais, ce qui, de manière impossible, devrait porter leur durée de vie moyenne à 60 ans. Donc « on va dans le mur ».

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