En comparant la situation dans le Jura avec les incendies dans le massif des Landes de Gascogne, nous avons élaboré un rapport à la suite de la mission flash des départements de France avec mon collègue André Accari. Il a évoqué le souvenir d'un incendie dans le Jura où des agriculteurs se sont spontanément mobilisés avec leurs tonnes à lisier pour contribuer à la défense contre l'incendie. Le Jura n'était pas préparé pour fédérer et coordonner ces bénévoles qui arrivaient spontanément, prêts à aider, mais sans garantie d'être réquisitionnés pour être protégés, assurés et éventuellement indemnisés. Parfois, ils se rendaient sur le site de l'incendie de manière spontanée, sans coordination, même si la défense incendie relevait du SDIS, et cet apport complémentaire devait être impérativement coordonné.
La grande différence, dans notre cas, réside dans le fait que la DFCI a été capable de jouer le rôle d'intermédiaire pour coordonner les bénévoles. Je me souviens, à Guillos par exemple, d'un entrepreneur forestier qui est arrivé avec un camion-citerne sans même avoir été réquisitionné et sans se préoccuper des étapes nécessaires pour garantir son assurance et son éventuelle indemnisation. La DFCI a directement repris la main et est parvenue à coordonner ces bénévoles. Ce type d'organisation mérite d'être étudié et potentiellement dupliqué ailleurs, car il est riche d'enseignements sur la structure de l'approche bénévole.
Par ailleurs, nous prenons un risque lorsque nous organisons spontanément l'appui aux forces présentes, en particulier en ce qui concerne le soutien logistique. J'ai eu l'occasion d'en discuter avec des maires et j'ai moi-même vécu une situation similaire avec l'ouverture du domaine départemental d'Hostens, où nous avons dû accueillir et servir des repas à près de 2 000 personnes. Nous prenons en effet un risque sur le moment sans poser de questions, notamment si une épidémie de salmonellose circule au moment où nous servons ces repas.
En ce qui concerne le domaine départemental, nous avions la chance d'avoir une cuisinière sur place, connaissant les normes HACCP, même si je doute qu'elles aient été pleinement respectées au moment de l'incendie. Nous avons également bénéficié de l'aide de restaurateurs bénévoles. Tout cela a été organisé de la meilleure manière possible, avec la mise en place d'une sorte de supermarché local pour gérer les stocks, ainsi qu'une chaîne de restauration en self-service proposant des repas de qualité correspondant aux besoins des personnes mobilisées. Je tiens à souligner l'importance du bénévolat dans cette organisation, ainsi que la coordination nécessaire, assurée par la DFCI. Par ailleurs, les élus locaux, les bénévoles et la population agissent de manière très volontaire, mais il reste toujours cette part de risque.
Le contrôleur général a également évoqué les coupes tactiques, ce qui m'a rappelé les négociations avec les propriétaires forestiers. Je peux vous assurer que convaincre certains d'entre eux de couper leurs arbres pour prévenir la propagation de l'incendie a été un vrai défi. Nous devions anticiper en nous projetant un à deux jours dans l'évolution de l'incendie et la plupart des pare-feux créés à ce moment-là ont réellement limité la progression de l'incendie. Cependant, deux d'entre eux se trouvaient à l'extérieur du périmètre, mais étaient là à titre préventif, ce qui était compliqué à expliquer aux propriétaires. Depuis, la législation est venue faciliter le recours à ces procédés.
Lors des tempêtes Klaus et Martin, je me souviens que des personnes arrivaient avec des tronçonneuses à la mairie, prêtes à couper des pins. On les envoyait sur une piste forestière menant à une maison très isolée où une personne était sous respirateur et devait être évacuée de toute urgence. À ce moment-là, personne ne se posait la question de l'assurance ou du danger vis-à-vis de ceux qui intervenaient. Cet aspect est également important à prendre en considération. L'élan de solidarité est extraordinaire, mais il présente une part de risque.