Nous sommes face à des défis quasi civilisationnels, avec la crise écologique et l'explosion des inégalités. Nous avons donc, plus que jamais, besoin de produire des connaissances scientifiques et de qualifier notre jeunesse aux métiers de demain. Par ailleurs le savoir émancipe et l'université doit redevenir un pilier de notre démocratie. Il est donc essentiel de refonder le service public de l'enseignement supérieur et de la recherche, qui est malade d'un manque chronique de moyens et d'un management organisant la concurrence entre tous ses acteurs.
Examinons le projet de loi de finances à l'aune de ces enjeux. Avec 15,2 milliards d'euros, les crédits du programme 150 sont en réalité en baisse en euros constants de 0,77 % par rapport à 2023. L'État ne compense que la moitié des mesures de revalorisation salariale annoncées en juin. De plus, les universités sont confrontées à une augmentation de leurs dépenses énergétiques non compensées par l'État. En ponctionnant les fonds de roulement des universités, le Gouvernement les met en grande difficulté.
Les crédits du programme 231, Vie étudiante, sont certes en hausse, mais ils ne suffiront pas à résorber la précarité étudiante. Le Gouvernement avait annoncé 500 millions supplémentaires pour financer le premier acte de sa réforme des bourses. Il a menti et les crédits n'augmentent finalement que de 120 millions. L'insuffisance des moyens se traduit par un manque de places en licence et en master. Plus de 100 000 lycéens, soit 17,5 % des bacheliers, n'ont pas obtenu la formation de leur choix en 2023, et plus de 43 000 étudiants n'ont pas obtenu celle qu'ils souhaitaient en master – soit 21,7 %.
Ce manque d'investissement dans l'enseignement supérieur conduit à une forte augmentation de la place prise par le secteur privé, lequel bénéficie aussi de la réforme de l'apprentissage, sous perfusion de France Compétences, dont la dette atteint 11,9 milliards. Le privé bénéficie aussi de la marchandisation globale du secteur et il a connu, depuis 2001, une progression vertigineuse, de l'ordre de 160 %, puisque le nombre d'élèves est passé de 292 000 à 767 000. Pour toutes ces raisons, j'émettrai un avis défavorable sur les crédits de cette mission.