Comme vous le savez, dans la mission Santé sont inscrites des dépenses de santé ne figurant pas dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS). Les crédits de cette mission financent ordinairement la politique de modernisation de l'offre de soins et le pilotage de la politique de santé publique, au programme 204, ainsi que l'aide médicale de l'État (AME) et la contribution de l'État au fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante, au programme 183.
En 2022, la mission a connu un élargissement significatif de son périmètre avec la création du programme 379, qui vise à financer la compensation à la sécurité sociale des coûts des éventuels dons de vaccins à des pays tiers et à servir de canal budgétaire au reversement des recettes de la Facilité pour la reprise et la résilience (FRR) de l'Union européenne dédiées au volet investissement du Ségur de la santé. En 2024, 906,9 millions d'euros sont ouverts au titre du reversement à la sécurité sociale des recettes de la FRR ; chaque année jusqu'en 2026, 15,2 % des recettes de la FRR devraient être reversés à la sécurité sociale, pour un total de 6 milliards.
Comme l'année dernière, le programme 204 Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins ne connaît pas d'évolution majeure. Il faut toutefois souligner que le fonds de concours qui abritait les dépenses liées à la crise sanitaire et en faveur des cabinets de conseil – dont nous avons beaucoup parlé les années précédentes – devrait enfin s'éteindre à la fin de l'année 2023.
Les crédits destinés à l'indemnisation des victimes de la Dépakine sont maintenus au même montant qu'en 2023, soit 24,4 millions d'euros. Je rappelle l'importance de mener une campagne de communication à destination des victimes potentielles de la Dépakine. En effet, si le fonctionnement du dispositif d'indemnisation des victimes s'est beaucoup amélioré, il faut reconnaître que le nombre de dossiers déposés reste bien en deçà de celui des victimes potentielles. Il faudrait déployer une large campagne de communication pour les identifier, en s'appuyant notamment sur les bases de données de l'assurance maladie. Une salve de courriers devait être envoyée à 1,2 million de femmes, mais la crise sanitaire a empêché l'aboutissement de cette démarche. J'invite le Gouvernement à reprendre cette initiative rapidement.
En matière de gestion de crise, le programme 204 prend en charge la création d'un entrepôt national de données de biologie médicale – désormais dénommé LaboéSI – doté de près de 8 millions d'euros. Il assurera des missions de veille et de sécurité sanitaires.
Le programme 183 Protection maladie comprend les crédits de l'aide médicale de l'État. Pour 2024, la programmation initiale des crédits de l'AME de droit commun s'élève à 1,137 milliard d'euros, soit un montant stable. La prévision de dépenses dépend de la consommation des prestations hospitalières – soit 733 millions d'euros –, des produits de santé – 132 millions d'euros – et des autres soins de ville – pour 292 millions d'euros. Les crédits ouverts pour l'AME de droit commun intègrent 20 millions de moindres dépenses en 2024 au titre des diverses réformes de l'AME menées depuis 2020. Cela n'est pas suffisant.
Le dispositif de l'AME n'est plus soutenable pour nos finances publiques. La dépense liée à cette aide a augmenté de 41 % depuis 2017. Le nombre de bénéficiaires a explosé : au 31 mars dernier, dernier chiffre connu, on recensait 422 686 bénéficiaires de l'AME de droit commun, soit presque 20 000 de plus que six mois plus tôt. C'est une augmentation de près de 133 % depuis la création du dispositif et 35 % depuis 2017. Il convient d'y ajouter 15 000 bénéficiaires pour les soins urgents. Au total, il est possible d'estimer le nombre de bénéficiaires de l'ensemble des dispositifs de l'AME à près de 440 000 en 2023.
S'ils sont de plus en plus nombreux, ces bénéficiaires sont toujours aussi imparfaitement connus : j'ai donc déposé une nouvelle fois un amendement visant à autoriser le recueil de leur nationalité.
L'AME de droit commun devrait être limitée aux soins urgents et à ceux liés à la lutte contre les pandémies, à la grossesse et aux vaccinations obligatoires, afin d'aligner la situation française sur celle des autres pays européens. J'ai bon espoir que la mission lancée par la Première ministre sur l'AME aboutisse à des conclusions similaires.
Dans l'attente d'une réforme d'ampleur, je vous invite à ne pas voter ces crédits, en raison du caractère insoutenable des dépenses de l'AME.