Les choses ont réellement commencé à se mettre en place à la suite de l'événement organisé par Roxana Maracineanu au CNOSF avec le gouvernement et l'ensemble des ministres parties prenantes. Cela a permis de déclencher une étincelle pour la lutte contre les violences sexuelles dans le mouvement sportif. Des référents ont été ensuite désignés au niveau des fédérations. C'était avant le début de mon mandat. L'animation de ces référents a été confiée au CNOSF. Il est vrai qu'il n'y avait pas de commission de lutte contre les violences sexuelles. J'ai nommé tout de suite Catherine Moyon de Baecque présidente de cette commission. C'est la première qui ait gagné son procès contre ses agresseurs, ce qui lui a valu d'être bannie du mouvement sportif.
J'ai été particulièrement touchée par cette prise de conscience très importante ce 21 janvier. Toute la salle était debout. Nous avons tous compris que nous ne pouvions plus rester inactifs et que nous devions tous prendre nos responsabilités. Dès lors qu'elle a été nommée au sein de cette commission, Catherine Moyen de Baecque m'a accompagnée sur l'ensemble des territoires lors de mes déplacements. Elle a parlé et fait lever des salles entières. Avec la commission, elle a dressé une feuille de route très précise – ce qui n'était pas le cas sous les mandatures précédentes. Avec elle, j'ai aussi reçu Isabelle Demongeot, qui est investie au sein de la FFT, ainsi que Sarah Abitbol, que nous avons accompagnée avec son association après que le gouvernement l'a fait. Je pense très sincèrement que Catherine Moyon de Baecque, tout comme Sarah Abitbol ou Isabelle Demongeot, faisaient partie des victimes qui auraient eu besoin de davantage de soutien. Isabelle Demongeot évoque des séquelles invisibles.
Je pense qu'il y a encore beaucoup à faire pour la prise en charge des victimes, par exemple avec le ministère de la Santé afin de faire en sorte qu'elles soient suivies sur le long terme, notamment par des psychologues. Sarah Abitbol a déclaré qu'elle devait payer encore aujourd'hui pour ces frais alors que cela remonte à des années. Nous avons travaillé en concertation avec le gouvernement, avec Fabienne Bourdais et Amélie Oudéa-Castéra, pour que les choses avancent.
Pour répondre précisément à votre question, je pense que le CNOSF et le mouvement sportif en général ont le devoir de réhabiliter Catherine Moyon de Baecque car elle a été privée d'une carrière de sportive de haut niveau. Elle a été privée d'une participation aux Jeux olympiques alors qu'elle avait gagné son procès ! C'était finalement elle la « pestiférée ». Ce n'est pas concevable. Nous avons encore le temps. Ce serait un acte très fort que de la réhabiliter, avec un mea culpa du mouvement sportif et de l'ensemble de ses acteurs. Je pense que nous le lui devons.
Avant de venir, je relisais le rapport Sauvé. N'avons-nous pas le devoir de recenser le nombre de victimes au sein du mouvement sportif et de voir comment nous pouvons contribuer à une réparation. Dans le cas de l'Église, si je ne m'abuse, 35 millions d'euros ont été prévus à cet effet. Nous devons y réfléchir si nous voulons enrayer ce fléau. Bien sûr, les actions menées précédemment n'étaient pas suffisantes, ni les mesures que j'ai mises en place. Ce fléau est tel que nous devons aller encore plus loin, même si je dois dire que les fédérations font un énorme effort pour dégager des moyens humains et financiers.
On parle des fédérations, mais savez-vous que sur les cent neuf fédérations, certaines n'ont pas de salariés ? Je pense par exemple à la Fédération de la balle au tambourin, qui représente tout de même quelque deux mille licenciés en Occitanie. On compte deux cents mille licenciés pour la pétanque mais cette fédération a-t-elle les ressources financières pour employer à temps plein une personne dédiée à la lutte contre les violences sexuelles parce que nous en aurions besoin ? Naturellement, nous en avons déjà discuté avec Mme la ministre. Ne doit-on pas aussi mettre en place des cadres d'État qui seraient chargés de cela, mais pas au détriment du développement ou de la performance ? Dès lors que les fédérations héritent de cette responsabilité, elles doivent disposer des moyens pour l'exercer. Je prendrai un dernier exemple : celui de la Fédération de roller, qui a été fortement concernée par la lutte contre les violences sexuelles il y a trois ou quatre ans. Des bénévoles ont dû instruire les dossiers pour la commission de discipline alors qu'ils n'avaient reçu aucune formation. Certains bénévoles ont démissionné parce que gérer ces dossiers est difficile psychologiquement et parce qu'ils n'ont pas les compétences. Le CNOSF a pris en charge la formation des référents.