Je répondais à Mme Colombier ; je vous répondrai ensuite.
Nous trouverons ensemble des pistes de financement, qui relèvent du débat national sur les économies, notamment sur l'immigration, la fraude fiscale, certaines coopérations et l'aide médicale de l'État (AME). Tout dépend de l'ambition que l'on nourrit pour la France. Nous défendons la vision d'une France puissance, ayant de l'influence dans la zone indo-pacifique, capable de défendre sa souveraineté dans sa ZEE ainsi que de lutter contre la pêche illégale et l'immigration.
J'en viens à la question de Frédéric Boccaletti sur les infrastructures en outre-mer. Le risque est de construire des bases à deux vitesses. Des moyens significatifs sont mobilisés pour l'accueil des nouvelles capacités de l'AAE, notamment le triptyque A400M-Rafale-MRTT. La base d'Istres-Le Tubé a bénéficié de moyens importants en 2023 pour développer les infrastructures capables d'accueillir les MRTT, notamment un second centre de maintenance et un centre de formation rutilant doté d'un simulateur de très grande qualité, ainsi qu'un terminal permettant d'accueillir 9 000 tonnes de fret et 100 000 passagers par an. Sur ce point, la LPM tient ses promesses.
Ce qui m'inquiète, c'est la situation des infrastructures existantes. Certaines pistes aéronautiques, notamment celles de Cazaux, de Solenzara et de Nancy, nécessitent de gros travaux de rénovation. Ils prennent du retard, car ils sont trop contraints par des normes environnementales ou sécuritaires. En dix ans, le coût de la rénovation a été multiplié par sept, pas seulement à cause de l'inflation.
Ces normes obèrent nos capacités de rénovation des infrastructures, d'autant que le seul budget en baisse, s'agissant des autorisations d'engagement, est celui de la sous-action Infrastructures aériennes de l'action 04 du programme 178. L'état des infrastructures n'est pas sans conséquence sur le recrutement et sur la fidélisation, qui sont l'enjeu majeur de demain pour nos armées. S'il y a deux niveaux d'équipement, les aviateurs et les mécaniciens travaillant sur les bases moins bien équipées se sentiront lésés.
Dans le domaine spatial, je regrette l'abandon, dans la LPM, d'un troisième satellite Syracuse 4C, qui avait pour vocation de répondre aux besoins de communication des plateformes aéronautiques ; je milite pour la mise à l'étude rapide du Syracuse 5. S'agissant du programme européen Iris2 – infrastructure de résilience et d'interconnexion sécurisée par satellite –, le Retex de la guerre en Ukraine a mis en lumière des difficultés d'accès à certaines informations lorsque l'on dépend d'un acteur commercial. J'espère que la promesse de souveraineté sera tenue.
Le satellite CSO-3, qui accuse plusieurs années de retard en raison de l'indisponibilité de vecteurs de lancement, devrait être lancé fin 2024, sous réserve de la mise en service d' Ariane 6. Il faut d'ores et déjà se préparer à lancer son successeur, Céleste.
Par ailleurs, un effort important est consenti au profit du programme ARES et au développement du patrouilleur-guetteur Yoda, accompagné de son radar et de son centre de commandement. Des autorisations d'engagement de 1,2 milliard ont été budgétées pour ce programme, ce qui me semble un minimum, sachant que la maîtrise de l'espace est un prérequis pour acquérir la supériorité opérationnelle sur le champ de bataille. Demain, il faudra donner un coup d'accélérateur pour protéger nos capacités spatiales.
J'en viens à la question de M. Jacques. Je n'oublie pas que la précédente LPM était une loi de réparation, et qu'elle allait jusqu'en 2025. On peut donc légitimement estimer – c'est du reste la communication de la majorité – que nos armées ne sont pas totalement réparées. Je me contente de le pointer du doigt.
Il suffit de lire l'indicateur sur la « capacité des armées à intervenir dans une situation mettant en jeu la sécurité de la France », qui figure dans le rapport annuel de performances 2022, pour constater les capacités d'intervention de l'AAE sont les plus faibles des trois armes. Il est de mon devoir de le dire publiquement. Parce que je crois à la pertinence d'une AAE puissante, il est de mon ressort de dire que, en matière de capacités, la réduction et le décalage des cibles sont préjudiciables au contrat opérationnel.
Il est particulièrement éloquent que les contrats opérationnels de la LPM soient en retrait sur ceux de la précédente, alors même que celle-ci a été construite en 2017, dans un contexte international très différent du nôtre. Aujourd'hui, ça brûle aux quatre coins du monde et la nation doit faire un effort. En six ans, vous avez creusé la dette de plus de 600 milliards. Nous devrions parvenir à trouver des financements pour répondre aux besoins de l'AAE.