Djibouti ne se comprend que dans son environnement régional. En dépit des déclarations parfois tonitruantes et martiales du président éthiopien sur l'accès à la mer, l'interdépendance de Djibouti et de ses voisins est très forte. Je n'imagine pas l'avenir de la relation entre Djibouti et l'Éthiopie hors d'une coopération mutuellement bénéfique.
En ce qui concerne la Chine, sa présence est impressionnante en matière d'investissements dans le domaine civil, qu'il s'agisse de ports, de routes ou de chemins de fer. Des infrastructures critiques de grande ampleur, essentielles au développement de Djibouti, ont été construites par la Chine, auprès duquel Djibouti est endetté de façon majoritaire.
Djibouti fait face à des défis en matière de développement, de jeunesse, d'emploi et de pression migratoire – de 40 000 à 50 000 personnes y transitent chaque année et s'y arrêtent de plus en plus, sur le chemin des États du Golfe ou au retour. Il en résulte une forte pression sur les infrastructures civiles, notamment les hôpitaux. Le pays a une tradition historique d'accueil des nomades, mais cette pression devient progressivement un sujet de préoccupation.
L'investissement dans les infrastructures civiles est donc élevé. La France doit y prendre toute sa place. Nous n'avons certes pas la force de frappe financière de la Chine, mais nous sommes attendus sur ce point. Le président Ismaïl Omar Guelleh a déclaré, lors d'un entretien accordé au printemps à Jeune Afrique, qu'il attend de la France qu'elle investisse davantage, notamment dans le domaine aéroportuaire – Djibouti veut se doter de nouvelles capacités en phase avec son développement. Il s'agit d'une voie d'approfondissement de notre partenariat, qui doit prendre une dimension globale dans les années à venir.
Les domaines de la santé, de l'éducation et de la coopération économique sont aussi des enjeux. Tout recul de notre part est un espace laissé à d'autres. Par exemple, les investisseurs français et franco-djiboutiens se plaignent du manque de liaisons aériennes assurées par Air France entre Paris et Djibouti. La baisse du nombre de rotations a permis à la Turquie de jouer un rôle plus important dans le commerce de Djibouti avec l'Europe au sens large.
Nous ne luttons pas avec les mêmes armes ni avec les mêmes valeurs. Notre présence historique et notre rôle de pourvoyeurs de souveraineté sont des atouts. Nous devons faire davantage en matière de coopération civile dans toutes ses composantes.