Je tiens à remercier les personnes auditionnées, notamment les membres de la maison ATHOS de Cambes, près de Bordeaux, pour l'accueil chaleureux qu'ils m'ont réservé.
Si l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre est devenu Office national des combattants et victimes de guerre (ONACVG) pour s'adapter à l'évolution de ses ressortissants, notre degré d'ambition et d'exigence envers ceux à qui nous devons tout doit rester inchangé.
Le budget soumis à notre examen s'inscrit dans la continuité des efforts fournis en faveur du monde combattant par la secrétaire d'État chargée des anciens combattants et de la mémoire. Il pourrait néanmoins être plus ambitieux, notamment dans un contexte d'inflation élevée. Il préserve et consolide l'existant, tout en introduisant des mesures nouvelles.
Avec près de 1,9 milliard d'euros en crédits de paiement (CP), les crédits alloués à la mission sont stables, même s'ils connaissent une légère diminution de 0,38 %. Cette stabilité doit être saluée : ce n'est que la deuxième fois, depuis 2001, que ce budget ne diminue pas d'une année sur l'autre, comme l'a rappelé devant cette commission Mme Patricia Mirallès.
La revalorisation anticipée du point d'indice de pension militaire d'invalidité (PMI) au 1er janvier 2024, à hauteur de 1,5 %, qui tient compte de la hausse du point d'indice de la fonction publique intervenue en juillet, constitue un progrès bienvenu sur ce sujet prioritaire pour le monde combattant. Elle est toutefois insuffisante compte tenu de l'écart observé entre l'évolution des prix à la consommation et celle du point de PMI depuis 2005. Les invalides de guerre et les anciens combattants, qui perçoivent une retraite modeste, sont particulièrement préoccupés par cette évolution, d'autant que leurs difficultés matérielles s'aggravent.
Contrainte par les règles de recevabilité financière encadrant le dépôt d'amendements au projet de loi de finances (PLF), je suis dans l'incapacité de proposer un amendement visant à revaloriser le point de PMI, sauf à prélever les crédits nécessaires au sein du programme 158 Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale. Ne pouvant me résoudre à déshabiller Pierre pour habiller Paul, j'appelle le Gouvernement à consentir une revalorisation supplémentaire.
L'année 2024 sera riche en rendez-vous mémoriels, au premier rang desquels le cycle de commémorations des 80 ans des débarquements et de la Libération. Nous poursuivrons la délocalisation des cérémonies nationales entamée en 2023, dans le but d'y associer plus largement nos concitoyens, notamment les plus jeunes. Ainsi, les crédits dévolus à la politique de mémoire connaissent une hausse significative de 87 % par rapport à 2023, pour s'élever à 42,4 millions, dont 19,8 millions affectés au financement des commémorations et 16,9 millions à la restauration et à la mise en valeur du patrimoine mémoriel.
Par ailleurs, le nouveau plan d'accompagnement des blessés militaires et de leurs familles bénéficiera de près de 5,5 millions d'euros de mesures nouvelles, intégrant notamment l'entrée en vigueur d'importantes dispositions adoptées dans le cadre de la loi de programmation militaire (LPM) 2024 – 2030, telles que la réparation intégrale, dont l'enveloppe est de 2 millions, et l'assouplissement de la majoration pour tierce personne, à hauteur de 620 000 euros de dépenses nouvelles.
À titre principal, le budget 2024 finance la montée en puissance du dispositif ATHOS, à hauteur de 2,06 millions supplémentaires, ce qui permettra d'ouvrir en 2024, comme prévu, une cinquième et une sixième maison.
J'en viens à l'effort de solidarité en faveur des harkis et des rapatriés, qui se poursuit et s'intensifie cette année. Près de 112 millions de crédits sont inscrits à l'action 7 de la mission, ce qui représente une hausse de 11 millions d'euros. La décision du Gouvernement d'étendre la liste des structures donnant droit à réparation, en y intégrant les quarante-cinq sites proposés par la Commission nationale indépendante de reconnaissance et de réparation des préjudices subis par les harkis (CNIH), explique l'essentiel de l'augmentation de 9,8 millions de l'enveloppe dédiée, qui s'établit à 69,8 millions. Je demeurerai vigilante aux propositions de la CNIH, qui doit expertiser quatre-vingt-sept sites supplémentaires en 2024.
Pour tenir compte des évolutions relatives aux maisons ATHOS et à l'effort de solidarité en faveur des harkis, la subvention pour charge de service public de l'ONACVG est portée à 62,56 millions d'euros, soit une hausse de 2,35 millions par rapport à 2023. En matière de solidarité, la subvention accordée à l'ONACVG pour financer son action sociale a été maintenue à 25 millions. Je serai attentive à ce que les moyens financiers et humains qui sont accordés à l'Office soient en bonne adéquation avec l'accroissement de ses missions.
Le renforcement du lien armée-nation se matérialise à travers la politique du ministère des Armées en faveur de la jeunesse. Le budget 2024 est de 26,9 millions, ce qui représente une hausse de 1,59 million en CP par rapport à 2023. Sur cette somme, 22,75 millions seront consacrés à la journée défense et citoyenneté (JDC) et 3,3 millions au service militaire volontaire (SMV).
À l'heure où le renforcement des forces morales de notre nation doit constituer une priorité, il faut lancer une réflexion sur le contenu de la JDC, qui consacre trop peu de temps aux enjeux de défense et de mémoire. Son articulation avec la journée défense et mémoire (JDM) du service national universel (SNU), qui mobilise également la direction du service national et de la jeunesse (DSNJ), doit faire l'objet d'une attention particulière.
Enfin, je terminerai cette première partie de mon propos consacrée au budget, en évoquant la question des reçus fiscaux, soulevée par les membres des associations d'anciens combattants. Toutes les associations du groupe des 12, dit G12, n'étant pas reconnues d'intérêt général par l'État, les dons et les cotisations ne sont pas systématiquement déductibles des impôts. Or ces associations mènent des actions qui vont au-delà de la seule défense des anciens combattants. Elles contribuent au travail de mémoire et au renforcement des forces morales de la nation. Il faut donc entamer une réflexion pour étudier les conditions dans lesquelles un tel statut pourrait être attribué aux associations qui en sont privées.
J'en viens maintenant à la partie thématique de mon rapport, qui porte sur les maisons ATHOS. Au printemps, la secrétaire d'État chargée des anciens combattants et de la mémoire a présenté le plan Blessés 2023 – 2027. Le dispositif ATHOS, désormais pérennisé, vise à la réhabilitation psychosociale des militaires et anciens militaires victimes de blessures psychiques en service. Il a été créé en réponse à l'augmentation du nombre de ces blessés résultant du durcissement des combats sur les théâtres des opérations extérieures (Opex).
Initié en février 2019 puis expérimenté par l'armée de terre, le dispositif compte quatre maisons. Celles de Bordeaux et de Toulon ont ouvert dès janvier 2021, celle d'Aix-les-Bains en avril 2022, celle d'Auray en avril 2023. Au 1er septembre 2023, elles comptaient 337 membres.
Pour accompagner la montée en puissance du dispositif, le pilotage a été confié à l'Institution de gestion sociale des armées (Igesa), en continuité avec le rôle que celle-ci a tenu durant la phase pilote, et à l'ONACVG à partir de juillet 2023. Les résultats encourageants de l'expérimentation ont ouvert la voie à une extension du dispositif, sans toutefois qu'aucun bilan n'en ait été rendu public, ce que je regrette. En visite à la maison ATHOS de Bordeaux, j'ai constaté la pertinence de ces structures, qui répondent à un réel besoin et s'avèrent complémentaires des autres modes de prise en charge. La maison de Bordeaux a toutefois atteint son point de saturation, ce qui justifie d'étendre le dispositif.
Je me suis employée dans mon avis à dresser identifié plusieurs axes de progrès : améliorer l'identification de militaires potentiellement éligibles sortis de l'institution, qui sont parfois « perdus de vue » ; développer la communication en poursuivant notamment le déploiement des dispositifs d'« aller vers » tels qu'ATHOS-nomade et ATHOS-famille, qui sont en cours d'expérimentation ; accélérer la simplification des démarches administratives pour le blessé ; veiller à l'égalité territoriale du dispositif, notamment en outre-mer et poursuivre le développement des partenariats extérieurs et du mécénat, pour assurer l'ouverture de nouvelles maisons.
Pour toutes les raisons précitées, j'émets un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission pour 2024.