Je ne m'attarderai pas à évoquer cette mesure qui a fait couler beaucoup d'encre, à juste titre, tant elle méconnaît et stigmatise les allocataires du RSA. Je me permets seulement de rappeler qu'un quart d'entre eux sort de ce dispositif en cours d'année car ayant obtenu un emploi, et que d'autres accomplissent un travail informel, domestique, associatif ou de soin, par exemple en s'occupant d'un proche âgé ou handicapé.
Cette mesure, de surcroît, affectera essentiellement les femmes : 32 % des bénéficiaires du RSA sont des personnes seules ayant au moins une autre personne à charge, soit, dans leur écrasante majorité, des mères de famille monoparentale. C'est comme pour la réforme des retraites : l'égalité, c'est sympa au fronton des mairies, mais entre femmes et hommes au travail, on repassera !
Vous affichez l'objectif de donner « à chacun l'accès à l'autonomie et à la dignité par le travail » : sans dignité garantie aux bénéficiaires du RSA dans leur recherche d'emploi et leur accompagnement, sans salaire suffisant, sans possibilité de s'épanouir au travail, cela restera une formule magique. Cette idée selon laquelle combler de cadeaux les plus aisés fait que tout le monde bénéficie de leur richesse ressemble à votre théorie du ruissellement. Si vous y croyez encore, allez donc l'expliquer au tiers des Français qui se privent désormais de nourriture, faute de moyens !
Vous l'aurez compris, ce texte issu du Sénat est encore pire que celui que nous avions déjà critiqué à l'Assemblée – produit déséquilibré d'une vision du travail dépassée, passéiste, à contretemps de l'urgence du moment.