Après quatre-vingts heures de débats dans notre assemblée, j'ai l'honneur de vous présenter, en ma qualité de rapporteur et au nom de ma collègue corapporteure Mme Christine Le Nabour, le texte issu des travaux de la commission mixte paritaire (CMP) qui s'est réunie le 23 octobre, texte qui a été adopté par le Sénat jeudi dernier. Députés et sénateurs se sont attachés à enrichir un projet de loi qui vise à rénover l'accompagnement des demandeurs d'emploi dans un contexte de baisse du chômage, à favoriser l'insertion sur le marché du travail des personnes en situation de handicap et à améliorer la gouvernance de l'accueil du jeune enfant.
Les discussions ont été nourries, franches, parfois passionnées, mais j'ai la conviction qu'elles nous ont permis d'adopter un texte reposant sur des solutions pragmatiques, conçues dans une perspective clairement assumée : atteindre le plein emploi.
La première pierre du projet de loi, posée à l'article 1er , est la transformation de la nature même de la liste des demandeurs d'emploi : elle devient un outil d'accompagnement de l'ensemble des personnes sans emploi, allocataires de l'assurance chômage ou bénéficiaires du RSA.
L'ambition portée par le projet de loi se traduit aussi, à l'article 2, par une meilleure définition des objectifs de chaque demandeur d'emploi ainsi que des moyens pour les atteindre. Le bénéficiaire du RSA et son référent pourront ensemble fixer des objectifs progressifs afin de construire de nouvelles perspectives professionnelles, mais aussi de lever les freins périphériques rencontrés. S'agissant de la mise en œuvre du plan d'action, nous sommes parvenus à une rédaction de compromis, après de longs débats dans chacune de nos assemblées. Si les sénateurs ont ajouté une obligation d'activité d'au moins quinze heures par semaine, nous avons prévu des cas de minoration voire d'exemption.
L'article 3 construit un régime de sanctions plus progressif en créant une sanction intermédiaire, dite de suspension-remobilisation, avec possibilité d'un reversement rétroactif dans la limite de trois mois.
Le titre II propose une nouvelle organisation du service public de l'emploi. L'article 4 crée le réseau pour l'emploi réunissant l'ensemble des acteurs de l'emploi, de la formation et de l'insertion afin de définir un nouveau cadre de coopération. Le texte que nous vous proposons d'adopter repose sur un équilibre entre coopération renforcée et respect des compétences de chacun jusqu'aux bassins d'emploi. S'agissant du comité national, nous avons recherché un équilibre entre représentativité et prise de décision efficace.
Le nom de l'opérateur principal du service public de l'emploi a donné lieu à des discussions à l'article 5 et je me félicite du compromis trouvé sur la transformation de Pôle emploi en France Travail, nécessaire à l'impulsion d'une nouvelle dynamique au sein du réseau pour l'emploi.
Les articles 6 et 7 constituent des briques supplémentaires dans notre stratégie en faveur du plein emploi à destination des publics les plus fragiles ou en besoin de formation supplémentaire, tout comme les articles 4 bis D et 7 bis, ajoutés par notre assemblée.
L'article 11, quant à lui, permettra de s'assurer de la bonne application à l'ensemble du territoire, y compris dans les outre-mer, des principes de ce projet de loi.
J'en viens au titre III et je tiens à saluer, à cette occasion, le travail réalisé par ma collègue Christine Le Nabour. Il rassemble des dispositions tendant à favoriser l'accès à l'emploi et le maintien dans l'emploi des personnes en situation de handicap, dans le prolongement des précédentes réformes, en particulier celle inscrite dans la loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel.
L'article 8 enrichit la législation sur plusieurs points, que je ne mentionnerai pas tous : il étend à l'ensemble des bénéficiaires de l'obligation d'emploi des travailleurs handicapés, l'application des dispositifs ouverts aux seuls travailleurs reconnus handicapés par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (CDAPH) ; il supprime le principe de l'orientation de ces travailleurs en milieu ordinaire pour qu'elle devienne l'orientation de droit commun ; il pérennise les dispositifs expérimentaux relatifs aux CDD tremplin et aux entreprises adaptées de travail temporaire (EATT).
L'article 9 traduit quelques-unes des annonces faites lors de la dernière conférence nationale du handicap, en particulier celle consistant à faire converger les droits individuels et collectifs des travailleurs accueillis au sein des établissements et services d'aide par le travail (Esat) vers ceux qui sont reconnus aux salariés.
J'en viens aux dispositions du titre IV. L'article 10 fait des communes les autorités organisatrices de la politique d'accueil du jeune enfant et les charge de remplir certaines missions comme le recensement des modes d'accueil et des besoins des familles d'enfants de moins de 3 ans, l'information et l'accompagnement des familles. Seules les communes de plus de 10 000 habitants seront tenues d'élaborer un schéma pluriannuel de maintien et de développement de l'offre d'accueil du jeune enfant et de mettre en place un relais petite enfance, dit RPE. Les nouvelles obligations incombant aux communes entreront en vigueur, pour l'essentiel, le 1er janvier 2025.
Enfin, l'article 10 bis rénove en profondeur le régime de l'inspection et du contrôle des établissements d'accueil du jeune enfant (EAJE), ce qui apparaît indispensable au regard des carences de la législation actuelle et de la situation sur le terrain, bien décrite par l'Inspection générale des affaires sociales (Igas) dans son rapport de mars dernier.