Nos villages sont les enfants pauvres des politiques publiques, des déshérités « menacés », comme je le soulignais auprès de mes collègues de la commission des lois, « par leur agglomérat dans des entités sans âme et trop grandes pour eux ». Ébranlés par les déserts médicaux, éprouvés par l'absence de services de proximité, nos territoires ruraux, nos terroirs, sont les grands oubliés de politiques par trop centralisées, alors même que 33 % de nos compatriotes y vivent.
Aussi nous réjouissons-nous qu'une proposition de loi contribue à revaloriser ces artisans d'une certaine cohésion sociale dans nos villages, ces points d'appui précieux des maires, exerçant un métier aux fonctions multiples : les secrétaires de mairie. Le groupe Rassemblement National votera donc ce texte de bon sens. Si rien n'est fait, une profession valeureuse autant qu'un maillon essentiel entre le maire et ses administrés risque de disparaître.
Avec plus de 1 900 postes qui attendent d'être pourvus et une pyramide des âges particulièrement défavorable, le métier de secrétaire de mairie est en péril : en 2020, il a été couronné du titre de première profession en tension de l'emploi territorial, alors qu'il n'occupait que la quatrième place de ce classement en 2018. Je regrette d'ailleurs que mon amendement au projet de loi de finances (PLF) visant à créer un indicateur propre à mesurer l'attractivité du poste de secrétaire de mairie ait été repoussé par le Gouvernement.
Comme en commission, nous saluons l'instauration d'une formation qualifiante pour ces professionnels : elle est aussi nécessaire aux missions de ces derniers qu'à la reconnaissance de leur métier. Précisons néanmoins qu'elle sera dispensée par le Centre national de la fonction publique territoriale, dont l'une des missions consiste à prodiguer à l'ensemble des personnels territoriaux les formations statutaires obligatoires. Nous avons déposé un amendement en ce sens, sur l'article 2.
Plus fâcheux en revanche : la création d'une formation au niveau national semble remise en cause par les dispositions du texte relatives au rapport prévu sur ce sujet. Alors que selon l'article 2 ter A, dans sa rédaction issue du Sénat, il s'agissait d'un rapport « évaluant selon quelles modalités peut être créée, au niveau national, une filière universitaire préparant au métier de secrétaire général de mairie », la nouvelle rédaction, tissée de précautions oratoires, remet en question la légitimité même de ce qui nous apparaît comme une nécessité. Ce métier aux rangs désertés mérite d'être enseigné à l'échelle nationale afin d'être plus largement exercé dans le futur. N'est-ce pas la condition de sa revalorisation ?
Dans cette perspective, le bénéfice d'un avantage spécifique pour le calcul de l'ancienneté paraît opportun. Un amendement en ce sens a d'ailleurs été adopté en commission. Il était soutenu par l'une de nos collègues du groupe Rassemblement national. Ce léger avantage ne doit pas occulter le grand absent de ce texte : une mesure convaincante portant sur la rémunération indiciaire ou indemnitaire, qui ne doit cependant pas peser sur les collectivités territoriales car leurs moyens financiers sont bien trop restreints.
Ne nous leurrons pas : la déshérence de ce métier s'explique par un manque d'attractivité qui ne sera comblé que par une revalorisation salariale ainsi qu'une plus grande reconnaissance. Les tâches du secrétaire de mairie s'apparentent parfois à celles d'un directeur général des services, comme le souligne à juste titre mon collègue Yoann Gillet dans la présentation de l'un de ses amendements.
Autres oublis regrettables : les cas où un secrétaire doit quitter son poste, gérer un remplacement imprévu ou lorsqu'il ne parvient plus à travailler de concert avec son maire – du fait d'une incompatibilité ou d'une rupture de confiance. Le texte ne prévoit rien pour parer à de telles éventualités, c'est pourquoi j'ai déposé un amendement après l'article 5.
Chers collègues, nous mesurons l'occasion que représente un tel texte pour nos secrétaires de mairie, pour nos maires et leurs administrés. Soucieux de la bonne organisation de la cité et de la continuité d'un service public de proximité, lequel suppose un échelon subsidiaire efficace et sûr, nous voterons en faveur de la proposition de loi.