Cela a été dit, et chacun en convient : les secrétaires de mairie sont de véritables piliers de la vie communale. En ma qualité d'élu d'une circonscription rurale de 126 communes, dans le département de l'Allier, dont l'immense majorité ne compte pas plus de quelques centaines d'habitants, je mesure, lors de chaque réunion avec les maires, le lien essentiel, décisif, organique qui existe entre le maire et le secrétaire de mairie, et la relation de confiance et de respect mutuel qui les lie.
C'est encore plus vrai dans les communes rurales, où les secrétaires de mairie sont parfois le principal – et souvent l'unique – collaborateur du maire. Du reste, je devrais parler de collaboratrice, puisque 94 % des secrétaires de mairie sont des femmes. Pour nos concitoyens, elles sont souvent le premier contact avec l'administration et le service public.
Conseillères techniques et, de fait, conseillères politiques, il leur arrive même d'être écrivains publics en aidant les administrés dans leurs démarches administratives. Leur rôle est donc important non seulement pour garantir le bon fonctionnement de la collectivité, mais aussi pour assurer la cohésion sociale et lutter contre l'exclusion.
Par ailleurs, le recul de l'État, en matière d'ingénierie et de services publics locaux – c'est encore plus vrai dans les territoires ruraux – a renforcé leur rôle et leur place dans nos mairies, mais a également rendu leurs tâches plus complexes et accru leurs responsabilités.
Cette fonction requiert des compétences de plus en plus fines et variées. Des compétences financières d'abord, puisque les secrétaires de mairie assistent le maire dans la préparation du budget tout en étant le garant de l'exécution budgétaire. Des compétences rédactionnelles ensuite, car les secrétaires préparent les délibérations du conseil municipal, les arrêtés municipaux ou encore les actes d'état civil. À cela s'ajoutent l'instruction des demandes d'urbanisme, la gestion funéraire qui comprend toutes les démarches consécutives au décès, l'organisation des élections, le suivi des services et des agents techniques de la commune, le montage des dossiers de subventions ou d'enquête publique.
Bref ! Lorsque le Président de la République, il y a un an, affirmait que les maires « portent la République et […] au quotidien face à toutes les crises la capacité à tenir », c'était aussi, en creux, un hommage aux secrétaires de mairie. Pourtant, à chaque fois que je rencontre les maires de ma circonscription, je ressens leur inquiétude. Le manque de reconnaissance du métier fait craindre une véritable pénurie de secrétaires de mairie.
C'est le métier le plus en tension de la fonction publique territoriale, et les petites collectivités peinent à recruter, voire n'y parviennent pas. Les emplois sont souvent à temps partiel ou précaires. Ainsi, 1 900 postes ne sont pas pourvus et, d'ici à 2030, un tiers des secrétaires de mairie sera à la retraite.
Alors, il faut faire quelque chose. Aussi partageons-nous pleinement les objectifs de la proposition de loi, qui reprennent largement ceux de la proposition de loi de notre collègue Céline Brulin et du groupe communiste, républicain et citoyen du Sénat, adoptée à l'unanimité le 6 avril dernier. D'ailleurs, monsieur le ministre, pour gagner du temps, vous auriez pu la reprendre.
Nous soutenons l'instauration d'une formation initiale qualifiante et commune à l'ensemble des secrétaires de mairie. Nous soutenons la possibilité, pour les communes de 1 000 à 2 000 habitants, confrontées à des difficultés de recrutement, de recruter à temps complet des contractuels pour leurs emplois permanents de secrétaires de mairie. Nous soutenons également la création d'une voie de promotion interne pour des agents de catégorie C, afin de leur permettre, grâce à un processus de reconnaissance des acquis de l'expérience, d'être nommés en catégorie B. Ce sont autant de mesures que la proposition de loi, présentée par les sénateurs communistes, prévoyait.
Nous souhaiterions aussi aller plus loin, en permettant à celles qui appartiennent de longue date à la catégorie B de rejoindre la catégorie A. Nous sommes également favorables à un plan de déprécarisation de la profession, qui permettrait d'intégrer les contractuels dans la fonction publique territoriale.
Compte tenu de la charge financière que représente ce type d'emplois pour des petites communes, il convient de prévoir des mesures de compensation, afin que cette requalification en catégorie A ou B devienne une réalité, ce qui pose la question décisive des moyens des collectivités. Monsieur le ministre, vous ne pouvez l'ignorer.